Chronique du 22 juin 1999

Sais-tu, ô lecteur au pif écologique, que les dépotoirs peuvent être source d’énergie ?
J’explique. Quand tu envoies ta merde, pardon tes déchets domestiques, à la décharge, tu contribues par ton geste à la production de méthane, du fait de ta matière organique qui se décompose là où il n’y a pas d’oxygène. Tu sens le truc ?

Bon, marque une pause, visite une décharge, respire fort, et reviens poursuivre ta lecture.

Je continue. Il suffit donc de placer des tuyaux sous le tas de tes déchets organiques, bref de ta merde, pour récupérer ce précieux méthane qui bêtement livré à lui-même contribue à l’effet de serre et fait que tu te prends soudain pour une plante exotique.

Si donc à Saint-Pierre nous parvenions à placer quelques tubines – mot régional pour des tuyaux en cuivre permettant d’avoir de l’eau à tes chiottes ou dans ton lavabo -, au lieu dit « la dump », – « de l’anglais to dump, jeter », comme a dit un jour une amie candidate malheureuse à une élection législative, que je salue au passage, nous pourrions nous passer du fuel si brut qu’on doit le domestiquer avant usage. Tu imagines la tête de tous nos chercheurs d’or offshore ?

Parce que, si nous n’avons pas encore trouvé les moyens de pomper nos « vases organiques transformées par l’action de fermentations anaérobies », comme se tue à nous l’expliquer le Petit Robert à l’article pétrole, au point que faute de technique, de connaissances et de moyens nous sommes appelés à faire appel à nos voisins canadiens, tu comprends le plaisir qu’on aurait à produire de la merde en tout genre pour nous chauffer. A titre d’exemple, rien qu’à se bouffer entre nous, on produit pas mal de déchets. Et ça, on sait faire.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
22 juin 1999