Chronique du 8 juillet 1999

Dans la Lettre du Conseil Général de juin 1999, j’ai découvert la disparition d’un homme de valeur dont l’apparition sur la scène locale ne m’avait pas sauté aux yeux. Il s’agit du collaborateur parisien de la SODEPAR, société de développement de l’Archipel, monsieur Bernard Coutaud.

J’ai donc lu non sans émoi le panégyrique d’un homme qui aura eu la mauvaise idée de clamser dans un accident de la circulation sur les routes vouées aux hécatombes de notre mère patrie.
Chargé du suivi de plusieurs dossiers, « principalement dans le domaine agro-alimentaire », ayant assuré « à plusieurs reprises la représentation de l’Archipel à Bruxelles », il est à espérer qu’il n’ait pas connu un instant de distraction du fait de la contamination des poulets belges. Ou, compte tenu de l’intoxication desdits poulets, aura-t-il pensé qu’il pouvait en être de même en France et que la sécurité routière en avait pris un coup au point qu’il se serait cru autorisé à appuyer un peu trop sur le champignon ?

Réduit à des conjectures, je ne peux que m’attrister à mon tour du fait que le Conseil Général devra désormais travailler à Coutaud tiré. On se demande donc quelles en seront les conséquences. Comme quoi, sur une île, on s’intéresse souvent aux gens une fois qu’ils ont mis les voiles.

Je me dis donc que si l’on s’attachait à révéler l’existence de tous les inexistants, surtout de leur vivant – car l’inexistence, ô lecteur contrit, n’est pas l’apanage des anges -, on pourrait immédiatement se mettre à tresser des couronnes, ce qui renforcerait le potentiel de nos marchands de fleurs, et contribuerait, même qui sait, à créer d’autres emplois. Surtout si l’on se livre à l’exportation.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
8 juillet 1999