Chronique du 9 Mai 2002

Que d’événements depuis ma dernière chronique, ô lecteur électeur, ô lectrice électrice. Exit Lionel, acteur malheureux de sa dernière représentation ; vous prendrez bien un billet de parterre, monsieur le candidat premier ministre. Et Lionel est parti. Adieu la politique ! Ces vaches de Français sont bien trop versatiles ! Que ne verra-t-on pas désormais de socialistes à cocktails reconvertis en chiraquiens dociles dans les salons des pouvoirs faussement décentralisés.

A droite toute ! Et encore, on l’a échappé belle. Un tour supplémentaire et la France finissait sur les récifs. Non à Le Pen ! s’est écriée la rue. Pourtant, près de six millions de Franchouillards se seront pétainisés, à la grande surprise de tous ceux qui croyaient au fil du temps que tous les Français avaient fait de la résistance.

Fossé entre la France d’en haut et la France d’en bas, ont glosé les commentateurs. Il est vrai qu’à force d’être pris de haut par des politiciens autistes, le péquin ordinaire finit par se convaincre qu’il doit se réfugier dans les bas-fonds des urnes. “Je vous ai compris”, s’est écrié Chirac, le maître-queue de la République. Il était temps.

Non à Le Pen,! aura-t-il fallu clamer haut et fort. Les 82% de voix qui se seront portées au deuxième tour sur Chirac le 5 mai 2002 véhiculent plus aujourd’hui la force d’un refus que celle d’une approbation. Quant aux voix qui se seront confirmées pour Le Pen, y compris à Saint-Pierre et Miquelon, combien d’entre elles reflètent la grande désillusion vis-à-vis d’une nomenklatura énarchisée? Un très grand nombre, sans doute.

De l’air, on étouffe ! clame le peuple à ses représentants qui n’en manquent pas.

“Sur l’île de Ré/
Ma belle adorée/
Je t’emmènerai/
Bientôt”
Lionel est parti se refaire la cerise avec sa femme, comme pour redonner vie à la chanson de Nougaro.

“J’aimerai toujours le temps des cerises ;/
C’est de ce temps-là que je garde au cœur/
Une plaie ouverte”, pourra-t-il chanter encore.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
9 mai 2002