Chronique du 23 Octobre 2002

Certes notre image au fil des décennies avait pu se ternir. Voyez donc ces affreux agitateurs, ces irréductibles Français des Grands Bancs d’Amérique, malmeneurs (néologisme hérité de l’histoire) de préfets et autres têtes hexagonales, de dénoncer la presse dite nationale parce que son siège est à Paris, à distinguer de la presse régionale qui tire ailleurs et de la presse insulaire qui se fait l’écho de ceux qui papotent dans les popotes. Même le Canard Enchaîné a cru bon donner de son bec en son temps en n’écoutant qu’un son de (pauvre) cloche pétri de certitudes sur ces terribles insulaires irrespectueux de la chose publique.

Il était temps d’exorciser les années Cluchard (1974-1975) – le gouverneur séquestré -, les années Lefebvre (1983-1985) – le préfet embarqué par la foule (et débarqué illico par le Gouvernement) et les années Transall gavés de mobiles venus à la rescousse.

Le 23 octobre 2002, la Commune de Saint-Pierre aura fait Jean-René Garnier, ancien Préfet de Saint-Pierre et Miquelon du 24 juillet1987 au 29 décembre1988, et aujourd’hui Secrétaire d’Etat à la Mer, citoyen d’honneur de Saint-Pierre. L’Archipel retrouve ainsi sa fraîcheur de terre hospitalière, tant vantée par tous ceux qui ont su l’aimer pour avoir su la découvrir, avec ses rochers, ses dunes, ses plates-bières, ses résineux rabougris, ses quadrupèdes, ses morues et ses bipèdes. D’ailleurs l’intéressé a su exprimer tout le plaisir ressenti à l’annonce de la décision du Conseil Municipal de Saint-Pierre : “Dans l’Archipel, j’ai vu ce qu’était la solidarité” a déclaré l’heureux impétrant dans l’Echo des Caps.

Comment ne pas se réjouir? Cela ne fait-il pas du bien de retrouver Saint-Pierre, sa clef sous le paillasson et son p’tit coin de paradis, sous un coin de parapluie.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
23 octobre 2002