Chronique du 9 Octobre 2002

Tu auras sans doute noté, dans mes récentes chroniques épisodiques, ô lecteur amoureux de la gent canine, que je me suis léché les babines à prendre connaissance des conditions nécessaires au sain hébergement des chiens sevrés rassemblés au minimum par dix. Car si les chiens sont neuf, le lieu d’hébergement peut être zéro.

M’en gausserai-je ? Que nenni ! Car un chien sans son lit, te préciserai-je, c’est la chienlit qui guette le maître. Nos animaux ont droit à notre considération distinguée, n’en déplaise aux esprits muselés. Laissons donc aux bipèdes l’apanage de se tirer dans les pattes, de mener une vie de chien, de chercher toutes les niches de discorde. Humanisons la vie des chiens, afin de trouver autour de nous un peu d’humanité (exemple de discours possible pour homme politique en mal d’inspiration)

Appelons donc un chat un chat ; l’arrêté préfectoral définissant les règles de santé publique pour nos amis les bêtes à Saint-Pierre et Miquelon méritait bien qu’un canard virtuel lui réservât un coin-coin de choix.

Mais sais-tu que cet arrêté est le reflet d’une orientation nationale majeure ? Juges-en plutôt. ((Je n’ai pas dit Pluto)

Le Sénat (là où il y a de grands jardins avec de grandes pelouses) s’est donné un mal de chien dès 1998 pour régler le sort des chiens sevrés. “Les chiens sont considérés comme étant sevrés à partir de six semaines” précisait le rapporteur; Et nos députés et sénateurs fixèrent par la loi du 6 janvier 1999, les règles concernant les établissements d’élevage ou de garde de chiens ou de chats, d’où l’arrêté de 2002 à Saint-Pierre et Miquelon.

Comme quoi si on te dit désormais que la loi c’est pas fait pour les chiens, tu sauras quoi répondre.

Nom d’un chien ! t’exclameras-tu, si l’on pouvait s’occuper tout aussi bien des sans-abri, des sans-papiers ! Mais nos élus n’ont-ils pas d’autres chats à fouetter comme tu as pu le remarquer ? Ne véhiculent-ils pas le risque refoulé du chat dans la gorge, ce qui leur procure une sensibilité particulière vis-à-vis de nos chères petites bêtes à quatre pattes ?

En conséquence, l’avenir de notre Archipel ne passe-t-il pas par le fait de redonner à l’Île aux Marins le nom de l’Île aux Chiens pour faciliter la construction d’hôtels et le développement du tourisme ? Certes, mais ne seras-tu pas tenté de m’indiquer qu’on risque alors d’accuser Paris de ne pas attacher ses chiens ultramarins avec des saucisses ? Tu vois le chiendent ?

Quoi qu’il en soit, nous serions certainement mieux préparés à recevoir un Ministre ou un Président de la République. Un chien regarde bien un évêque…

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
9 octobre 2002