Chronique du 23 mars 2003

Pour un peu, un événement majeur risquait de passer inaperçu. Tout ça à cause de Georges W . Bush. C’eût été regrettable. Mais l’œil a beau être dans la tombe, là où pleuvent les bombes bushiennes, il n’en regarde pas moins Caïn.

Or la surprise est que pour une fois Caïn et Abel semblent s’être entendus à Sant-Pierre et Miquelon comme larrons en déverinette. Dans l’Echo des Caps du 21 mars 2003, voilà que le lecteur découvre estomaqué une lettre cosignée par les frères ennemis, Marc et Gérard ou Gérard et Marc, comme tu le sens, ceux qui habituellement ne peuvent pas se sentir. Bref, une « lettre commune adressée à Madame Brigitte Girardin, Ministre de l’Outre-Mer par le Président du Conseil général, M. Marc Plantegenest, et par le Député, Conseiller général, M. Gérard Grignon.

Un seul papier, une seule missive, deux signatures pour une même bafouille à madame la Ministre de l’Outre-Mer ! C’est pas beau ça ? On se dit qu ‘il y a anguille sous roche, ça ne fait pas un pli. Mais tant mieux pour l’anguille après tout – il faut varier les espèces -, car nos deux épistoliers attirent l’attention de madame la Ministre sur la facilité des Canadiens pour noyer le poisson des autres quand il n’y en a que pour eux. « Nous sommes persuadés que les Saint-Pierrais et Miquelonnais supporteraient encore moins qu’avant 1992 que le Canada décide de leur avenir », écrivent notamment les co-signataires. Ils en appellent au Premier Ministre par le truchement de Brigitte Girardin pour qu’il défende les intérêts de l’Archipel lors de sa visite prévue au Canada. Et de conclure, à cette occasion « nous serions heureux de recevoir dans l’Archipel Monsieur le Premier Ministre ». Mais cette conclusion n’a-t-elle pas un air de déjà vu ou de déjà entendu pour qui est aveugle ou les deux pour qui est sens dessus dessous ?

Mais cette réconciliation n’est peut-être pas à prendre après tout au pied de la lettre.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
23 mars 2003