Berger ou Mouton ?

Ainsi le Président, le nôtre, le rescapé accidentel du 21 avril 2002, nous aurait donné le LA en nous incitant à ne pas aller là-bas, avec les British et les Yankees ? Mais ne te vient-il pas à l’idée qu’il ait pu adopter cette attitude histoire d’emboîter le pas à une opinion publique largement défavorable à la guerre ? Berger ou mouton ? Là est une question parmi d’autres.

Il aura suffi d’un coup de fil à Georges W. Bush pour que le pragmatisme versatile l’emporte sur les bons sentiments. On ne va rester fâché avec une nation qui domine le monde, histoire de ne pas payer ses dettes. Car imagine que l’Amérique soit amenée à payer ses ardoises… Vive le pétrole irakien, le temps que dureront ces nouvelles roses, histoire de tromper la planète. Tant pis si cette nouvelle guerre a pour effet immédiat d’amplifier une nouvelle course aux armements. N’est-on pas plus à l’abri quand on dispose d’une dissuasion crédible ? Pyongyang incite davantage les Américains à la prudence aujourd’hui que Bagdad hier.

Tant pis si aucune arme de destruction massive n’a pour l’instant été découverte en Irak. Evitons de nous interroger sur les armes chimiques et bactériologiques dont disposent tant d’autres pays, à commencer par les Etats-Unis eux-mêmes. Il fallait que l’Amérique garde la direction des affaires internationales et, de ce point de vue, Georges W. Bush a gagné une bataille. Mais quels seront les effets sur le moyen terme ?

Quel regard pouvons-nous jeter sur une humanité qui n’arrive pas à s’assumer sans ces déchirements de plus en plus catastrophiques ? Face à cette interrogation, le coup de fil entre Chirac et Bush est bien dérisoire et la remise en question des évidences (des apparences ?) est plus que jamais nécessaire pour échapper aux grandes manipulations.

Henri Lafitte, 20 avril 2003