“Break syndical” avec Les Cowboys fringants

Tu veux du texte qui décape, de la chanson qui t’embringue, de la musique qui décolle, emboîte le pas des « Cowboys fringants », histoire de prendre un « break syndical » dans ta vie de salarié besogneux respectueux de l’ordre établi.

« Break syndical », c’est le titre de leur dernier CD, car ils en ont fait d’autres, bien que ce groupe du Québec sente bon la fleur de l’âge. Sais-tu qu’au Québec, il a bien fallu aller aux urnes, comme on le fait en France, comme on le fait à Saint-Pierre, à Miquelon. Y’a guère que l’Île aux Marins qui échappe à ce rituel tordu (tordu à cause des promesses). « « Quand je r’garde ça aujourd’hui Chu donc pas fier de ma patrie Ça dort au gaz dans bungalows Le cul assis su’l statu quo En s’gavant de téléromans ». Y’a quand même pas qu’au Québec qu’on s’enlise les mirettes dans les séries américaines aux nénettes qu’on se dit qu’après le feuilleton aseptisé elles ont la tête de l’emploi pour un film de cul, que ça serait au fond plus honnête.

Bon, je m’éloigne sans m’égarer. J’reviens aux Cowboys fringants et à leur chanson « en berne » qui ouvre l’album, histoire de nous mettre en forme. « Si c’est ça l’Québec moderne Ben moi j’mets mon drapeau en berne Et j’emmerde tous les bouffons qui nous gouvernent ! ». Eh ! On pourrait peut-être faire une version pour Saint-Pierre et Miquelon ? Tiens bon, j’vais m’en occuper un de ces quatre, comme du temps où je chantais « ils veulent avoir raison / Mais Dieu sait si pourtant ils se trompent parfois ». Tu vois que je n’ai pas été dépaysé. Tout juste un peu marri de me dire que tout a changé, sauf ce qui est resté pareil. « Aujourd’hui ça a un peu changé Les gars sont tous syndiqués Ça jase trois-quatre autour d’une pelle En r’gardant le plus jeune faire du zèle ». Car les illusions se renouvellent, en attendant les désillusions inéluctables toujours identiques. Tiens, je pense aux années soixante-dix quand je me disais qu’à Saint-Pierre il était temps que ça change. Quand je vois où en est rendue la politique locale aujourd’hui, je me dis que dans mes illusions post-adolescentes – les plus dangereuses, car vient alors le temps des premières certitudes -, je me le suis mis dans l’œil, profond, à me faire mal au coude.

Les Cowboys fringants se mettent à cinq pour nous décoiffer, histoire d’avoir le chapeau qui travaille enfin. Car dans ce monde qui s’enlise dans la mouise, il est temps de se réveiller tu crois pas ? « Quand on apprend que dans le nord (…) Que nos forêts sont mises à mort Ça jase dans l’opinion publique Deux s’maines et ça sombre dans l’oubli L’histoire est morte et enterrée. » Tiens, fais le compte de ce qui t’a tenu en haleine au fil des journaux télévisés depuis six mois et prends un post-it – le plus petite modèle – pour noter ce dont on parle encore.

« Si c’est ça qu’t’apppelles une nation Probable que tu sois assez con T’es mûr pour te présenter aux élections ». Pense à Saint-Pierre, dans ce domaine, y’a des places à prendre, comme ne dit pas l’Observatoire de la Fonction publique et les convictions y sont devenues accessoires.

Bon, je ne t’ai parlé que d’une seule chanson, « En berne », celle qui ouvre l’album. Je te reviendrai avec les treize autres, un de ces quatre.

Henri Lafitte, Chroniques musicales
29 mai 2003

Les cowboys fringants, « Break syndical »
Site internet : www.cowboysfringants.com