Chronique du 31 juillet 2003

Il fut un temps où nos îles s’appelaient les Onze Mille Vierges. Allez savoir pourquoi notre patronyme changea un jour. Pourtant, ça n’aurait pas été si mal de garder l’illusion d’une certaine pureté.

Et si le nom venait à changer par adéquation aux nouvelles réalités ? Saint-Pierre était lié à la pêche. Pourquoi pas aujourd’hui les Îles aux Onze Mille Trous de Poules ? On organiserait une fête sportive annuelle inter-îles ; le premier marcheur qui aurait rendu visite aux onze mille trous aurait gagné. Car bien sûr, on leur donnerait un nom, par respect, ce qui donnerait du boulot aux conseillers municipaux, sans oublier les fonctionnaires territoriaux, appelés à être de plus en plus nombreux, vu qu’il y aurait des trous à combler, au-delà de onze mille, et à entretenir en deçà, en prenant un soin particulier pour le onze millième. Les riverains seraient associés à la maintenance, chacun étant fier de son trou, naturellement. On ne referait que les trottoirs, pour mieux accentuer les contrastes.

Les données étant ainsi clairement définies, on ne courrait pas le risque de voir des Vierges marris, vu que le nom des origines appartiendrait bel et bien définitivement à l’Histoire. Personne ne se prendrait plus, non plus, pour un petit saint, vu l’abandon du second. Et l’hiver serait chargé de la conservation du patrimoine, à la grande satisfaction de nos édiles.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
30 juillet 2003