Chronique du 15 novembre 2003 (2)

Si la capacité hôtelière stagne à Saint-Pierre et Miquelon, force est de constater que la prison avec ses sept cellules affiche complet en ce mois de novembre 2003, au point qu’une extension pour deux capacités d’accueil supplémentaires est programmée. Une récente affaire de trafic de cocaïne est venue assurer le plein du bubon carcéral de notre microcosme insulaire.

Attrait de l’argent facile dans un contexte frontalier ? Dérive inéluctable de nos sociétés si facilement qualifiées d’avancées ? Perte de repères ? Frange déboussolée ou mal plus profond ? Nature des produits illicites et échelle du trafic mériteraient réflexion, mais celle-ci est étouffée faute d’information suffisante susceptible de donner lieu à des débats de fond. L’« interdit » n’a jamais empêché les transgressions ; sans doute faut-il plus que jamais jeter un regard sur la société que l’on s’invente et qui induit si souvent la quête de « paradis artificiels », sans oublier la recherche du profit par des gens sans scrupules sur le dos des plus fragiles. Le prix d’un kilo de cocaïne a de quoi faire phosphorer le quêteur de rutilance.

La gendarmerie souhaiterait, nous a-t-on dit sur les ondes de RFO, récupérer pour son propre usage l’espace occupé par la prison. Ne faudra-t-il pas envisager l’inverse, si l’on suit le cours des choses ? La floraison des képis n’a jamais été garante de l’équilibre des âmes.

Et si l’on considère l’extension de la prison comme une impérieuse nécessité, c’est bien qu’il y a quelque chose de faisandé au pays de la morue verte.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
15 novembre 2003