Chronique du 3 décembre 2003

Polémique autour du musée en ce début décembre 2003, l’exergue ayant été mis par voie radiophonique sur une pétition réclamant hic et nunc la présentation permanente au public dans les locaux du Musée de l’Arche des objets de l’ancien bâtiment.

D’accord, dit la directrice de l’Arche mais il faut d’abord régler le problème de la toiture qui fait l’eau et des vitres qui laissent passer plein pot la lumière.

Car on a le chic dans l’Archipel de construire des bâtiments sans se préoccuper de l’utilisation finale. Si on y ajoute qu’on ne tient pas suffisamment compte des contraintes spécifiques liées au climat, on obtient… un vaisseau fantôme, un musée qui fait l’eau comme une magne et une arche à discorde, à la différence de celle de Noé qui était faite pour flotter et qui flotta. Tu imagines la réputation de Noé si son rafiot avait pris l’eau par la faute de l’architecte ? Il eût été coulé, le pauvre, l’arche aurait traîné d’emblée la réputation de rafiot percé, on aurait eu droit à une pétition dans l’Ancien Testament et on n’aurait jamais pu donner le nom de l’Arche à un musée tout neuf.

Pétition ou pas, par temps de flotte ou ensoleillé, le problème structurel reste entier. Faudra trouver des solutions. Pourquoi pas des briques de Langlade à la place des fenêtres ? Des briques qui ne coûteraient pas des briques, en fait, mais qui arrêteraient la lumière et qui apporterait de surcroît sa part d’histoire locale. Quant à la toiture, puisqu’elle fuit, pourquoi pas en attendant une exposition sur le camping à Saint-Pierre et Miquelon à travers les âges ? Du tepee (terme sioux) des Micmacs à la caravane de Langlade (petit modèle), en passant par les tentes faites autrefois avec des sacs de farine Robinhood ?

On pourrait y ajouter une exposition complémentaire sur les parapluies, de celui que l’on présente aux dames par temps calme et pluvieux (à quoi bon s’obstiner quand le vent se déchaîne ?) à celui que l’on ouvre dans les administrations quand l’orage gronde.

Ainsi respecterait-on une fois de plus le patrimoine dans sa diversité, en faisant plaisir au plus grand nombre sans considérer que l’histoire s’est arrêtée en 1965. Car les musées de demain ne se préparent-ils pas également avec nos faits et gestes, bibelots, babioles, lubies, manies, dadas et enthousiasmes d’aujourd’hui ?

Et puis, dans un autre ordre d’idées, on pourrait faire une exposition sur les polémiques, mais il faudrait certainement construire une autre bâtisse avec de grandes fenêtres qui ouvriraient vers la mer, pour respirer.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
2 décembre 2003