A un moment de l’année où l’actualité judiciaire fait une nouvelle fois écran cathodique – le président du Conseil général figurant sur le banc des prévenus dans le cadre d’une affaire de favoritisme dans l’attribution de marchés publics -, Saint-Pierre et Miquelon ne risque-t-il pas de sombrer tout bonnement dans la mer des sarcasmes ?
Aussi éprouvé-je, ô lecteur d’aventure, le besoin de te livrer une nouvelle fois ce « cri du cœur » du… 23 mai 1990. Eh oui ! Le temps passe et ne fait rien à l’affaire, comme si le ridicule devait s’inscrire inéluctablement dans nos armoiries.
Mais résistons au pessimisme. Il se trouvera bien un jour un équipage pour hisser l’honneur au mât de misaine.
Qu’est devenu ton arrogance
A vivre en dépit de la France
A vivre en dépit de ses rois
Qui s’en foutaient de ton patois
Qu’est devenu ton verbe haut
Ta vie ton parler matelot
Qu’est devenu sur ton caillou
Le coup de sang des gargouillous
Qui ras-le-bol de leur cuisine
Chantonnaient sous des mains mutines
La liberté de leurs ébats
Volée aux prêtres d’ici-bas
Qu’est devenu ton idéal
De vie sans être le féal
De la manne que l’on dispense
Pour acheter ta dépendance
Qu’est devenu le matelot
Qui trimait sa peau sur les flots
Qu’est devenu ton devenir
Pour n’être plus qu’un souvenir
Du gars campé dans ses cuissardes
Cliché figé dans sa mansarde
Pendant que son âme s’enterre
Dans le tombeau des ministères
Qu’est devenu ce fier courage
Coin de ciel bleu dans les orages
Quand ballotté dans la tempête
Tu savais redresser la tête
Que deviendra ta descendance
Si tu n’es plus qu’une apparence
Ecoute-moi
Ma voix se meurt
De ta torpeur
Ressaisis-toi
Si tu désires
Notre avenir
(Extrait de Confidences insulaires, chanson écrite le 23 mai 1990)
Henri Lafitte, Chroniques insulaires
27 octobre 2004