Sanseverino, “Live au théâtre Sébastopol”

Ça m’a flashé dans la tronche comme un champignon qui t’irradie, mais à la différence de celui de Truman – tu sais, le mec qui a envoyé la bombinette sur Hiroshima, alors qu’il n’y avait pas besoin de ça pour que le Soleil Levant capitule – sans faire de mal. Du bonheur qui soudain t’illumine ! Et puis les esgourdes aussi. Sur la scène, un type aux cheveux rasibus qui pète la super forme ; autour de lui des zycos à te faire saliver tant ça swingue avec le piano, la contrebasse et les guitares. Le chanteur, musicien, clown, virtuose, comédien, te maîtrise la scène, ça, tu peux le dire s’il te reste un peu de souffle.

Car le souffle, il te le coupe, d’entrée. Miracle – putain, faut qu’on trouve un nouveau mot, plus agnostique, très champ’ athée – du DVD qui te transporte de ton salon au Théâtre Sébastopol, à Lille ! Et le son DTS qui t’enveloppe, te submerge, te subjugue. Il est superbement enregistré ce concert ! Les caméras ne laissent rien échapper. Mimiques, roulade sur les cordes, tempo ravageur, yeux avides du chanteur…

Sanseverino – Ah oui ! Faut quand même que je te donne le nom – mais pourquoi ai-je attendu de le découvrir alors que son nom est sorti de l’ombre de l’inconscience depuis 2001. Le spectacle lui est récent ; il date de cette année, 2004. Stupéfiant ! Une cadence de la parole que si tu essaies tu t,empêtres la langue dès les premiers mots. Lui, non. Une maîtrise impeccable. Il a dû en bouffer des crayons – c’est une méthode – pour en arriver à une clarté de la diction. Spectacle haletant dès les premières notes. Musique aux influences diverses avec forte présence manouche. Mais que cette chanson, « Rouge » est superbe avec ses accents moyen-orientaux ! Il ne tient pas en place le bougre. Les chansons s’enchaînent à un rythme endiablé. Ah ! La force des coups de patte « à l’enterrement de ma grand-mère ». Sanseverino réécrit Rimbaud, rien que ça. C’est vrai que ça se bat un peu partout encore. Tiens, on ne parle plus à la télé de l’Afghanistant, mais Rumsfeld est allé en Irak préparer les futurs morts. Vite l’ « artillerie lourde » ! Non, eh, con… pas l’américaine, mais une bien plus pacifique, celle de Django. Et cette java des bombes atomiques que l’auteur emprunte à Boris Vian ! Y’aurait pas moyen de recommencer avec tous ceux qui nous empêchent de vivre en paix ?

Clac ! Il est dans la salle, au milieu du public, seul, avec sa guitare pour enchaîner sur « les embouteillages » Un summum dans un One Man Show (le temps d’une chanson, mais quelle merveille !) Ce type, c’est du grand art, incarné. Et la chaleur humaine t’envahit, car il sait te la communiquer, avec sa part à lui de Coluche et de François Béranger.

Bref, il y a de l’espoir, tant que des artistes comme ça montent encore sur scène pour ravir autant de monde. C’est barge, barjot, barjo, mais tu te trouves soudain à faire du standing ovation, comme un type qui vient de gagner au loto ou d’attraper le toto devant son écran catho, catho, cathodique. Hic !

 T’as bu ou quoi ?

 Non, j’viens d’écouter Sanseverino.

Henri LAFITTE, Chroniques musicales
26 décembre 2004

Sanseverino, LIVE au théâtre Sébastopol

DVD – 22 titres + Un film reportage