Chronique du 1er mars 2005 (2)

« On a de la chance d’être Français » ; tel aura été l’enseignement qu’aura tiré le président du Conseil général de Saint-Pierre et Miquelon en se rendant aux îles Turks et Caicos sur des fonds européens. Ouf ! On respire. Qu’il eût fallu payer sur nos propres deniers pour une telle révélation eût pu nous rendre malades et alourdir subséquemment la note de la Caisse de Prévoyance Sociale vu le prix de journée de notre hosto délabré.

Encore un voyage dans un PTOM et l’on va finir par se dire que notre Centre hospitalier François Dunan n’est pas si mal que ça, après tout.

Pourquoi se plaindre alors ? N’est-ce pas la résultante de l’insularité chronique qui guette tout habitant des îles en zone subarctique ? Ne faudrait-il pas payer un voyage à chacun d’entre nous pour aller voir plus au sud ce qui se passe, histoire de ne plus avoir à se plaindre ? Une petite déprime et hop ! Un voyage aux îles Turks et Caicos. Fini le temps où l’on épinglait ceux qui se rendaient à la Barbade. Place aux transhumances comparatives. Tout un programme politique quand on y songe. Pourquoi réserver ce privilège européen à des représentants qui s’épuisent à vouloir convaincre des téléspectateurs qui comprendraient bien mieux s’ils allaient voir eux-mêmes ? Au prix des journées d’hospitalisation ainsi économisées, ne serait-ce pas une façon de prévenir plutôt que de guérir, une partie non négligeable de nos lamentations étant souvent sans doute d’origine psychosomatique. Ce qui coûterait moins cher, au bout du compte…

Et si cela permettait en sus de se sentir encore plus français…

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
1er mars 2005