Chronique du 14 septembre 2005

Tiens, on va parler musique pour changer de note. Parce que sur notre Archipel aux cabanes à chiens à ras de sol ou sur pilotis – il reste aussi des cabots ma foi toujours bien catholiques -, les musiciens aussi ont leurs portées. Quand celles-ci ne suffisent plus, place à l’écoute de celles qui nous viennent d’horizons différents. Sais-tu que les restaurants de Saint-Pierre ont vibré aux accents d’un artiste russe ? Stanislas Kholmogorov qu’il s’appelait (qu’il s’appelle toujours d’ailleurs), tout droit sorti de chez Dostoïevski, Tolstoï ou peut-être bien de chez Gorki. Une voix de stentor, une sensibilité pétrie de ces âmes venues de l’est, avides de francophilie, établie au Québec depuis dix ans, dans une osmose entre Pouchkine et Félix Leclerc, c’est te dire. Quand nous nous sommes retrouvés autour d’une table de cuisine, je t’avoue que le tambour de la machine à laver s’est fait tout petit (c’est fou ce qu’une machine à laver peut faire résonner une maison en bois). Chaleur de la rencontre, ardeur dans la quête de l’absolu, passion du partage, essence de la sincérité au cœur des mots et, en prime…, abolition des frontières. Ça m’a marqué, je te le jure (sur ta tête si tu veux). Dans les restaus, le public heureux a répondu présent, à l’Île de France, à la Voilerie, au Cabestan… Comme quoi, même en septembre, il est possible de bousculer la morosité préparatoire à toute visite ministérielle. Ne fera-t-on pas le point avec François Baroin, dans ces prémices d’automne, de ce que l’on a été ?

Mais je diverge en gambergeant. Bientôt, je te l’annonce, à la fin de ce mois, nous aurons la visite d’un artiste malgache. Erik Manana, tel est son nom, sera à l’Escale du CCS, dans une production partenariale avec l’association A Mare Labor, le Centre culturel, à Saint-Pierre et les Oiseaux de Passage à Québec. Si avec ces nouvelles tu ne te dis pas qu’on peut préparer les pelles à neige avec le sourire – vu qu’on n’aura pas vu passer l’automne -, je te parlerai pas des hirondelles qui de toute façon, comme la politique, ne font pas le printemps.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
13 septembre 2005