Chronique du 7 octobre 2006

Dans un espace aussi clos que le nôtre, les cristallisations s’opèrent vite. Qu’une journaliste affûtée sur les ondes relève la réitération d’une formule chez trois représentants politiques du même bord et voilà l’impudente pointée du doigt par le président du Conseil général invité sur le plateau du Vingt heures, le vendredi 6 octobre 2006, au lendemain de la consultation.

Or, les propos relevés, non tirés de leur contexte – l’abstention est le signe de la confiance envers les élus -, auront bel et bien été tenus, ce qui, dès jeudi soir, pouvait amuser l’auditeur capable de se décentrer par rapport aux enjeux. Tout pouvoir n’a-t-il pas besoin de contre-pouvoirs ? Le droit au doute, surtout chez les journalistes, n’est-il pas une nécessité ? N’est-ce pas leur rôle que d’exercer la vigilance ? Que l’on écoute un Mongrain sur les ondes de TVA révèle à quoi point l’approche à la française paraît souvent trop asservie.

Rien de bien méchant donc dans le relevé, rien qui n’empêche à la vie politique ordinaire de suivre son cours. On se dit d’ailleurs – tant la consultation n’était après tout que sauvage ou locale – que le nez de Cléopâtre ne risquait rien.

Mais le débat doit se nourrir de différentes expressions, le décryptage du dit et du moins apparent est, dans nos sociétés complexes, plus que jamais une nécessité. Ainsi va la vie démocratique. L’histoire de l’humanité ne révèle-t-elle pas de toute manière que la parole a toujours eu la force de trouver les chemins de la liberté dans son expression ?

Comprendre que la concordance des propos était le fait d’une similitude d’analyse n’avait donc rien d’inconvenant ; le droit de s’en étonner, voire même de s’en amuser, existe aussi.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
7 octobre 2006