Chronique du 25 janvier 2007

Ségolène Royal aborde des dossiers qui semblent lui échapper. Ainsi en va-t-il de son ingérence sur le thème de la « souveraineté du Québec ». Au nom de quoi la France aurait-elle la prétention de se prononcer sur la notion même de « souveraineté » pour une partie d’un ensemble souverain, une province du Canada ?

Un tel positionnement d’une candidate à la présidence suprême d’un pays pétri de sa propre Histoire n’est-il pas révélateur de l’ignorance franchouillarde d’une expression francophone multiple au sein de la fédération de notre grand voisin, ce voisinage étant la résultante de l’existence d’un élément de l’ensemble français, d’une collectivité territoriale d’une république fière de s’afficher « une et indivisible », nos îles, celles de Saint-Pierre et Miquelon ?

Il appartient aux Québécois de décider de leur destin. Jusqu’à présent, les référendums se sont soldés par une mise en minorité des tenants de la séparation. L’avenir de cette composante clef que représente le Québec au sein du Canada ne peut qu’avoir une incidence forte sur d’autres communautés francophones porteuses d’une identité spécifique, comme les Acadiens des provinces atlantiques et les Franco-Ontariens. Notre originalité, sur l’Archipel, est de pouvoir entretenir des liens forts entre différentes composantes, dans le respect de celles-ci, sans avoir à mettre notre nez dans des affaires qui ne nous regardent pas.

Accepterions-nous que nos voisins viennent se mêler de la conception de notre identité souveraine et de la liberté, en bousculant nos évidences ? Certes la petitesse de notre archipel pourrait ne pas perturber certaines têtes de la représentation hexagonale ; il en irait tout autrement si d’aucuns, de l’extérieur, s’entichaient d’un avenir sécessionniste pour la Guadeloupe, la Martinique, la Bretagne ou le Pays basque.

La France gagnerait à mieux prendre en compte l’originalité de l’expression de la langue française dans sa diversité au sein d’un pays bilingue, porteur d’une originalité qui n’est pas facile à dynamiser au fil des décennies, rien n’étant jamais acquis.

Ne risquerions-nous pas sinon, par imprudence, d’aller aux bois clairs sans trouver de lauriers ?

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
24 janvier 2007