Thierry Desjardins, Galipettes et cabrioles à l’Élysée

Fichtre ! Quel libelle ! « Galipettes et cabrioles à l’Élysée ». Et pas écrit par un homme de gauche ; Thierry Desjardins aura été rédacteur en chef du Figaro. D’ailleurs, il ne le cache pas, il a voté Sarkozy !

« Monsieur le Président de la République, Par pitié, calmez-vous ! Arrêtez de faire le pitre, de jouer les guignols, de nous faire honte. » Le ton est donné. Alors que le gouvernement vient de mettre en place une nouvelle commission, confiée cette fois à Christiane Taubira – une mission sur les accords de partenariats économiques -, après la commission Stiglitz, chargée de merner une réflexion sur croissance, et celle de Jacques Attali, cahrgé d’une commission pour libérer la croissance, sans parler de la commission Balladur, de la commission Pochard et autres « commissionneries », le constat fait mouche : « depuis votre élection, vous créez à tours de bras des commissions de ceci, des commissions de cela pour vous donner des idées. Vous n’en aviez donc pas ? » (p. 9) Nicolas II (après celui du Fouquet’s, n’avons-nous pas eu droit au Nicolas de la Grande Albion ?) peut-il se targuer d’avoir eu plus d’idées que Ségolène Royal, sa rivale ?

« Vous gigotez tellement que vous allez bientôt ressembler à un pantin désarticulé », écrit Thierry Desjardins ; la plume est sévère. « À force de ridiculer la fonction, vous n’allez plus pouvoir l’assumer ». Car l’auteur s’en prend à celui qui, oubliant la dignité de la fonction, n’aura pensé qu’à sa carrière. Et « méchant », avec ça. « Sur le plan de la méchanceté, les choses ne se sont pas arrangées, depuis votre élection. » (p. 25)

Et Thierry Desjardins de faire le point sur les abus d’images dans la mise en scène de la vie privée de Nicolas Sarkozy : « depuis votre entrée à l’Élysée, deux choses nous choquent et en scandalisent certains : votre goût affiché pour le « fric » et l’étalage impudique de votre vie intime. » (p.43) La dégradation de l’image présidentielle est une première. Après la grandeur d’un De Gaulle, on a sombré dans la petitesse : Les rois de France se faisaient sacrer à Reims, vous, ce fut au Fouquet’s » (p. 46) L’analyse n’est guère plus rassurante : « On se demande (…) d’où peut bien vous venir ce goût pour le fric qui s’affiche ostensiblement. Cela relève sans doute de la psychanalyse. » (p.49)

La charge est sans concession. « Je suis convaincu que Fillon a été parmi les premiers à comprendre que si votre programme était excellent et souhaité par une majorité de Français, vous étiez, vous, totalement incapable de l’assumer. À cause de votre frivolité, de votre agitation, de votre manque d’envergure. » (p. 115)

Comment ne pas s’interroger sur le récent effort du président, lors du récent entretien télévisé avec des journalistes pour redorer le blason de sa présidence dégradé(e) ? À force de l’entendre dire qu’il change au fil de ses découvertes, on en conclut qu’il n’était tout simplement… pas prêt, tant pour faire face aux défis intérieurs que sur la scène internationale où il n’est tout simplement pas bon. Le Monde du 26 avril 2008 ne souligne-t-il, confirmant l’analyse de Thierry Desjardins, l’image nettement dégradée de la France en Afrique, surtout depuis le discours malheureux de Sarkozy à Dakar, le 26 juillet 2007 ? « Deux maladresses dans un seul et même discours qui vous ont fait accuser d’être à la fois « un repentant pire que Chirac » et « un raciste méprisant les noirs » ». (p. 205)

« « La croissance, je ne l’attendrai pas, j’irai la chercher avec les dents. » Sur le moment, nous avions trouvé la phrase un peu ridicule. Rapidement, nous l’avons trouvée dérisoire. En fait, elle était absurde. » (p. 216)

Je ne sais pourquoi. Mais j’ai pensé à un Thierry Desjardins écoutant « les cardinaux en costume du dernier Cabrel : « Que vida ! Que triste ! De que pais se trata ! Del mio, no… Del mio no se puede ! »

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
26 avril 2008

Thierry Desjardins, Galipettes et cabrioles, Fayard, 2008
ISBN : 978-2-213-63737-2