Chronique du 20 novembre 2008 (2)

Une politique de mise en pièces progressive de l’Education nationale, pour un système où les plus démunis, les moins fortunés seront les premières victimes, voilà de quoi provoquer inexorablement un sursaut d’indignation, un vrai cri d’alarme de la part du monde enseignant. D’où un mouvement de grève national en ce jeudi 20 novembre 2008 qui aura concerné également l’archipel de Saint-Pierre et Miquelon, notamment dans l’enseignement public où le mouvement de protestation aura été très largement suivi dans le primaire et fortement dans le secondaire.

Car il ne faut pas se voiler la face ; l’archipel sera lui aussi un jour ou l’autre touché. Les mesures récentes visant à mettre l’outre-mer au pas sont la manifestation d’une attitude foncièrement différente de celles du passé, quelles que soient les majorités. Pour d’autres sujets, la spécificité des problématiques insulaires ou ultramarines est balayée d’un revers de main par un Yves Jégo pétri de certitudes. Entre les belles déclarations de principes et la dure réalité du terrain de demain, il y aura un gouffre. La loi du profit, de la rentabilité, avec un tel gouvernement, à l’idéologie droitière débridée, prime sur la valorisation de l’humain. Nous avions un système original au niveau des maternelles ? Tant pis, il est remis en cause. Ne faut-il pas s’aligner sur des exemples étrangers dont la pertinence reste à démontrer ? Les jeunes de demain ne seront-ils pas des clients d’officines privées où il faudra cracher au bassinet pour recevoir les accompagnements adéquats ? Aider les enfants en difficulté ? On supprime les réseaux spécialisés conçus à cet effet. 3000 postes dans la sciure, une paille. Le ministre Darcos traite le monde enseignant avec beaucoup d’arrogance, mais il ne suffit pas de se gargariser du mot « réforme » pour répondre aux vrais défis d’aujourd’hui. L’immixtion du politique dans la Mémoire dans le cadre de l’étude de l’Histoire à l’école était une réforme darco-sarkozyenne ; elle était une erreur ; elle vient d’être complètement retirée. Le Parlement ne votera pas de nouvelles lois mémorielles. Mais pour les suppressions de postes, le message est clair, elles vont continuer. Qui seront les prochains touchés ? Le mal est bien sûr insidieux ; 13 500 suppressions éparpillées sur l’ensemble du territoire, d’aucuns pourraient se dire qu’ils ne seront pas concernés. Jusqu’au jour où ça cogne à ta porte… Pendant ce temps UMP et Nouveau Centre ont voté pour que tout ministre puisse retrouver automatiquement sa place au Parlement dès qu’il y a remaniement ; faut bien se préserver.

Sans doute sommes-nous ici, comme en métropole, au cœur d’un débat de société. Lequel ? me diras-tu. Allons-y, mais c’est 200 euros la consultation. Tu as de la chance, c’est la période des réductions. Faut réformer, faut réformer…

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
20 novembre 2008