Chronique du 5 janvier 2009

Qu’est-ce qu’un vœu politique ? C’est l’espoir d’une mise en œuvre d’une logique à haute valeur positive ajoutée dont les prémisses devraient être la condition suffisante pour qu’elle se réalise, sauf que l’on sait d’avance que les données sont pipées et que l’on risque fort d’avoir émis des vœux pour préserver la façade du théâtre social.

N’attendrait-on pas plutôt des données précises contribuant à l’amélioration du sort de chacun du fait des choix effectués pour le bon fonctionnement du collectif dont nous sommes interdépendants ? Mais il est plus facile d’égrener des vœux que d’annoncer des mesures concrètes et acceptables.

Car à émettre le vœu que tu sois heureux, ô lecteur, comment puis-je imaginer ce qui peut contribuer à ce que tu le sois ? Certes je peux émettre un tel vœu, cela ne mange pas de pain et me dédouane. Cela peut relever d’une philanthropie que d’aucuns qualifieraient de douteuse. À trop afficher son amour du prochain, ne peut-on pas être suspect d’entourloupe possible ? Aussi est-il bon de relativiser les vœux et de ne pas mettre sur le même plan, bien que le mot soit le même, les vœux de sympathie entre gens qui aiment à s’échanger leurs amabilités sincères et ceux qui relèvent davantage de la comédie humaine.

Car des politiques on n’attend pas qu’ils émettent des vœux mais qu’ils se vouent au bien commun. Faut-il qu’on émette le vœu qu’ils soient à la hauteur de cet impératif ? Ce serait oublier qu’une vraie démocratie ne fonctionne pas si l’on s’en remet à la seule délégation : voter et se laver les paumes de ce qui peut arriver. Ëtre acteur d’une destinée collective qui préserve le champ privé de l’individu, voilà un défi plus difficile à relever que le menhir d’une certitude qui s’est écroulée. À écouter le sénateur de l’Archipel dans la formulation de ses vœux empreints d’une forte déception, face aux divisions qui se multiplient, force était de constater que le pouvoir par délégation conduit à des rivalités de coulisses. Chacun dans son coin et les vœux pour tous…

Renouveler au quotidien les conditions d’une destinée collective enthousiasmante ne relève pas d’un vœu mais d’un travail de tous sans cesse renouvelé. « Rien n’est jamais acquis à l’homme », aura écrit Aragon. S’imaginer que l’on puisse trouver les conditions d’un bonheur collectif pérenne relève de l’utopie. Le défi de l’ouvrage sans cesse remis sur le métier se joue des millésimes. Il est dans sa réécriture permanente.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
5 janvier 2009