Chronique du 4 juin 2009

« À vous de juger », que c’était annoncé ce jeudi 4 juin 2009 Sur France 2, retransmis sur nos ondes ultra-marrantes, forcément. Avec Arlette Chabot en maîtresse chahutée du grand foutoir. Tout ça pour nous inciter à penser « Europe ». Mais quelle idée, tout d’abord, que ces deux tables rondes éloignées l’une de l’autre avec, en ouverture, deux duos hérités des récents sondages, Xavier Bertrand, UMP, versus Martine Aubry, Parti socialiste, d’un côté, puis de l’autre François Bayrou, lui-même, vers… sus sur Daniel Cohn-Bendit, porte-drapeau des verts. Dérapage quasi immédiat, quand Bayrou pète les durites du fait d’un sondage qui le place après les écologistes. Le voilà vert de rage, naturellement. Et pas bon dans son attaque de caniveau contre son vis-à-vis qui aura réussi à ramener le débat sur le terrain de la décence. Bravo, monsieur Cohn-Bendit qui avez su aussi mettre du sel à bon escient dans ce débat de turbulences. D’ailleurs ne s’étonnait-il pas que la France soit le seul pays où ce type de débat n’a pour invités que des têtes de partis et non des candidats ?

Alors quand les autres premiers de la classe se sont pointés, les reproches ont fusé. Jean-Luc Mélenchon qui s’interroge aussi sec sur cette mise en scène avec entrées décalées et une Arlette Chabot pas contente et qui réagit à ces reproches. Puis Marine Le Pen, furieuse, elle aussi. Trois quarts d’heure à poireauter ! Que dis-je ? À mariner.

Tout à coup – j’étais allé dire bonjour à mon frigidaire -, j’ai entendu Bayrou dire « on est à ce point de basculement-là », que je me suis dit, mais de quoi t’est-ce que ça cause ? Car tout partait en vrille, malgré les gestes désespérés de la maîtresse des colles complètement submergée. Et Jean-Luc Mélenchon qui voulait en placer une. Mais Arlette qui ne le voulait pas. « Allez au diable », qu’il s’est lâché. Le seul qui en arrivait à s’imposer dans la retenue, la clarté du propos et qui amenait tout le monde à la fermer, c’était notre Olivier Besancenot qui passait lui comme une lettre à la poste. Bref, le meilleur de la soirée. Le gagnant de la mêlée. Une maturité qui faisait plaisir à voir sous ses airs de beau garçon. Puis ça repartait de plus belle. Martine Aubry, plutôt pas mal, avec des interventions qui tenaient la dérive, la partie grand guignolesque revenant à Philippe De Villiers. Sublime moment quand il explose pour reprocher à Daniel Cohn-Bendit ses années 68. Parce que vu la colère dégoupillée, il en avait sur la patate le Philippe. Marine Le Pen, insupportable d’agressivité. Pas drôle, elle, pour deux centimes. Ah ! Et puis j’oubliais mon Xavier, le Bertrand, dépassé par la charge de tous les autres, acculé, plutôt maté par l’adversité. Terne, lui qui dans d’autres circonstances sait tant déployer son assurance. Bon, il aura gardé son port de tronc – il présente bien, tout de même – et aura défendu son président, sans en faire un fromage. Du fait de la soirée, la partie n’était pas facile pour lui. La langue de bois aura bien fonctionné, bien proprette. Mais la présence restait digne, toutefois, reconnaissons-le.

Avec, au terme de ce merdier, de ce chaos, de ce K.O., de ce big bang cathodique, LCDique, plasmatique, une image très positive d’Olivier Besancenot, numéro 1 sur mon positionnomètre. Coup de chapeau à Daniel Cohn-Bendit, superbe trublion régénérateur, et surtout européen, numéro 2, donc, et qui mérite bien de devancer l’UMP et Martine Aubry, plutôt pas mal. Jean-Luc Mélenchon aura fait son possible pour donner des éclairages intéressants. Bayrou, lui, trop professoral , aura eu du mal à faire oublier son intervention introductive arrogante et déplacée.

Mais c’est Arlette Chabot qui m’aura fait rire aux larmes, à la voir, tantôt assise, tantôt debout, ne sachant plus où donner de la tête, bras écartés, doigt pointé, s’époumonant : « est-ce qu’on peut terminer ? », tout le monde sur le plateau s’en contrefoutant. Non aux bains turcs, ai-je cru comprendre. À moins qu’il ne se soit agi de toilettes. Non à la pâleur de la Chine. Ou autre chose. On a même parlé de l’Outre-Mer, plus éloigné que la Turquie, mais partie intégrante de l’Europe. Ouf ! Et puis, écoutez, bon, on ne s’entend plus, je veux ajouter, laissez-moi vous dire, ben merde alors, à quelle heure l’apéro, est-ce que ta sœur elle bat l’beurre, et mon rosé, il est blanc ?… Bleu, blanc, rouge ? Allons enfants de la partie, pour l’heure de gloire, faudra remettre ça… sur le plateau… À la fin Arlette en tablier de zappeur ne me semblait pas dans son assiette.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
3 juin 2009