Chorus ne chantera plus

C’est l’automne. Bientôt les feuilles mortes tomberont à la pelle. Mais les bonnes feuilles de Chorus seront elles aussi tombées. Chorus aux feuilles de chansons aura été victime d’une opération commerciale : rachat récent du titre censé lui assurer la stabilité financière, mise en liquidation judiciaire surprise du repreneur au cours de l’été et toute une équipe de passionnés qui se trouve ainsi privée de 17 ans de sève, nourrie d’un terreau encore plus ancien, celui du mensuel Paroles et musique.

Chaque changement de saison était pour moi un régal, à me plonger dans le nouveau numéro trimestriel qui humait la passion, la création et l’âme des artistes. Septembre 2009, les feuilles de Chorus manquent cruellement à l’appel.

Dans un communiqué, la rédaction de Chorus, sous le choc de cette « disparition brutale », fait part à ses lecteurs de sa « stupéfaction » et de sa « tristesse » : « Extrêmement choqués d’être ainsi placés devant le fait accompli et profondément attristés de la disparition d’un titre aussi emblématique (alors que la cession de la société éditrice avait eu pour seul but d’assurer la pérennité de la revue, après une transition de trois ans au moins avec ses fondateurs et son équipe rédactionnelle), et par respect envers les artistes que nous avons rencontrés pour ce n° 69, nous avons décidé de mettre ici en ligne une importante partie du numéro d’automne déjà terminée à la date du dépôt de bilan ».

Aussi voulais-je ici saluer les porteurs de rêve qui, avec Fred et Mauricette Hidalgo, sur les traces des princes d’écriture – je pense à un titre de Jean-Marie Vivier -, se faisaient l’écho de la vie sur les planches et nous invitaient à découvrir de merveilleux écrins d’écoute. Numéros qui se suivaient comme autant de pierres de mémoire pour témoigner encore, rappeler la richesse créatrice des grands noms et révéler la beauté de milliers d’inconnus. Travail ciselé qui se livrait dans ses atours d’encyclopédie sans cesse renouvelée.

« D’autres que nous ont mis fin au beau voyage du « navire amiral de la chanson francophone », le seul qui n’ait jamais viré de bord, « n’en déplaise aux jeteurs de sorts / son capitaine et ses mat’lots / n’étaient pas des enfants d’salauds / mais des amis franco de port / des copains d’abord » », de souligner une équipe de passionnés meurtrie.

Les Cahiers de la chanson ne nous feront plus partager leurs feuilles. Et je ressens, porté par le souvenir de Marc Robine, comme un immense « bleu » d’exil. “Il est cinq heures du matin dans les îles..”

Henri Lafitte, Chroniques musicales
22 septembre 2009

Pour en savoir plus

http://www.laredactiondechorus.fr/