Chronique du 5 avril 2011

Se souviendra-t-on d’avril 2011 ?

Un mois qui aura commencé en queue de vertébré à branchies, comme il se doit. Avec des poissons qui, plus loin, au-delà du nuage de la continuité, vers le couchant, là où le soleil fait joujou au pays du Soleil Levant, s’irradient les écailles de nos ancêtres abyssaux dans les eaux à haute teneur de césium ajouté. Et, tout près de nous, une usine de pêche auto-ébreuillée, tant elle aura chiqué la bourse à subventions jusqu’à la raquette, nous dit-on soudain.

Mais non, c’est pas possible ! Le sort s’acharne sur nous !, de s’écrier les Japonais. Mais non, c’est pas possible, le sort s’acharne sur nous !, de s’écrier des pêcheurs atomisés. Tant est grande l’obstination humaine à fermer les yeux sur le prévisible.

Louisbourg Seafood à SPM, c’est à l’eau. Encore une forteresse qui tombe, me diras-tu. Celle de la poudre aux yeux, assurément. Mais de la part de qui ? Adieu l’ « innovative business », comme ils disent. De l’océan au palais, lit-on sur le site de la compagnie. De l’océan au Palais… Royal, sans doute, pour qui connaît nos îles. Et des marchés si bien pensés qu’on en arrive, comme le précise l’informateur télévisuel local sur son site, à « des millions d’euros de dettes, un actionnaire aux abonnés absents, et l’État qui refuse de payer plus ». Et le président du Conseil territorial de réagir en suggérant que ça pêche du côté de Paris.

En attendant, à Saint-Pierre et Miquelon, le salarié de l’usine qui veut ses sous chie à la porte des soupirs, radié. Et toc ! ; Io ! reprendra l’amateur de pelote au pied du mur.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
5 avril 2011