Alcaz et les chemins… buissonniers de l’écriture

Il est des projets qui vous emportent, tant le défi initial s’avère reposer sur une idée qui méritait son déploiement ; ainsi en aura-t-il été de celui mis en œuvre par la Mairie de Saint-Pierre en partenariat avec le Lycée Emile Letournel, le Collège Saint-Christophe et le Centre culturel, sous la houlette de Gisèle Letournel, conseillère municipale et cheville ouvrière particulièrement motivée. Le duo Alcaz sera revenu à Saint-Pierre et Miquelon pour la troisième fois, pour une semaine d’écriture (quatre rencontres d’une heure en fait) avec des jeunes de sixième de collège, sous les mânes déclencheurs d’imaginaire de Georges Brassens – n’est-il pas pluriel le grand Georges ? -, mais aussi avec de jeunes musiciens de l’école de musique de la Collectivité.

Point d’orgue – de guitare, devrait-on dire -, un concert sur les tréteaux du Centre culturel, salle comble, public prêt à l’enchantement qui d’entrée se sera déployé. « La vie va », n’est-il pas vrai ?, chantaient à nouveau Viviane Cayol et Jean-Yves Liévaux, beaux dans leur présence sur scène, la finesse instrumentale, l’énergie synergique (ou l’inverse) de leur complicité fusionnelle, nourrie sur les planches, enrichie d’un parcours professionnel qui les amène souvent au Québec en particulier, mais aussi sur d’autres terres canadiennes. Beauté des voix superbement rendue pour cette soirée toute en nuances, en plaisir partagé et en surprises.

Pas de temps mort en effet. Première partie au fil d’une sélection de chansons du duo lui-même, sous la bannière alcazienne ; une « jolie chance » de réécoute ou de découverte. À la pause, les éloges virevoltaient dans l’attente emballée de la suite. Puis moment magique, bluffant dirait-on aujourd’hui, quand les enfants des deux collèges ont pris le chemin de la scène pour nous livrer leur production, Viviane Cayol à la baguette magique du capitaine de chœur (c’est mieux que le mot chef, non ?), Jean-Yves Liévaux à la guitare. Deux textes joliment troussés sur des airs de Brassens, surprenants de richesse imaginative, empreints d’humour, ficelés avec doigté comme toute chanson réussie. Une leçon d’écriture vivifiante pour nous tous qui en restions soudain baba. De quoi mériter le tonnerre d’applaudissements qui s’ensuivit.

Puis vint le tour des jeunes portés par leur passion instrumentale, Antoine Beaumont, à la basse, Killian Urdanabia et Mathias Boudreau à la batterie, pour un parcours de chansons de Brassens revisitées, où ils se révélaient en phase avec leur propre jeunesse, emmenés par un duo révélateur de nouveaux enjouements. Les « amoureux des bancs publics » se retrouvaient tout fringants sur le banc d’un nouveau départ. Et le vent des arts renouvelés de décoiffer, comme il se doit.

La soirée s’achevait illuminée par les faisceaux convergents vers le duo marseillais, superbe, « j’avoue », d’amour partagé. Pour rentrer chez soi la tête dans les étoiles.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
2 décembre 2012