Hommage à Aurélien Claireaux

J’ai appris ce lundi 26 mai 2014 le décès, hier, d’Aurélien Claireaux ; j’ai marqué une pause dans mes pérégrinations pour lui rendre un hommage. Aurélien, je me permets de l’appeler ainsi, comme l’auront fait nombre d’entre nous, était une figure, une voix, un personnage, chaleureux, impliqué dans la vie de notre communauté.

Aurélien Claireaux me ramène d’abord à mon adolescence ; c’était – pour ceux avec qui j’étais en classe de 4è au Collège Saint-Christophe -, notre prof de français. Nous l’aimions, à tel point qu’il fut le déclencheur de la première « manif » à laquelle j’aurai participé. Disons que nous aurons traversé le couloir, soudain arrêtés dans notre élan par François Maurer, le directeur en soutane et renvoyés dans nos murs. Aurélien Claireaux avait décidé de ne se consacrer qu’à l’ORTF alors qu’auparavant il faisait la navette entre les deux exercices ; c’était notre prof, on l’aimait, on le perdait ; on voulait le récupérer, il ne fallait pas qu’il soit remplacé. Aurélien était original, il fut le premier à nous parler de Jean Ferrat ; je ne me doutais pas que j’allais un jour admirer cet artiste.

Puis j’aurai retrouvé mon « ancien » prof, en le côtoyant à l’ORTF où j’aurai travaillé en tant que pigiste dans mes années estudiantines : et surtout, j’aurai fait le journal radio, avec lui, sous sa houlette, feuilles jaunes remplies d’infos tapées à la machine, qu’Aurélien raturait, modifiait de son stylo rouge, notes qu’il fallait alors déchiffrer en direct, dans mon anxiété de débutant. Mais Aurélien toujours chaleureux, respectueux du novice, permettait de dénouer l’anxiété qui vous étreint.

Nos chemins auront alors divergé ; je me serai retrouvé prof à mon tour dans la même classe, au même bureau ; j’aurai proposé Jean Ferrat à mes élèves, tête remplie de bons souvenirs. Et j’aurai comme tout le monde à Saint-Pierre et Miquelon, suivi Aurélien, le journaliste, prêt à sourire de ses remarques amusées, car il savait plaisanter, n’avait pas la grosse tête ; il avait le recul, en bon professionnel, par rapport au sérieux auquel le quotidien voudrait nous emprisonner. Qui ne se souvient de lui, commentant les rencontres sportives ?

Aurélien, homme de théâtre aussi ; une stature, une voix, quelqu’un qui réchauffait les planches , Aurélien, « Le Curé » de l’Île aux Chiens de la belle série télévisée Entre Terre et Mer, dont on aura malheureusement doublé la voix, pour des raisons techniques.

Car Aurélien Claireaux était cette voix qui nous touchait au plus profond de notre vie insulaire ; il était cette grande vibration qui traduisait notre âme.

Je pense à toi, je pense à vous, Aurélien.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
26 mai 2014