Sur un méandre de Charente

J’aime, ô lecteur, à me laisser porter par le souffle du hasard. D’ailleurs, celui-ci ne vient-il pas de t’amener à planter tes chasses sur cette chronique sortie du tréfonds de l’improbable ? Je n’ose imaginer à ce stade un quelconque déterminisme. Tu te vois, dépendant de tes clics sur la toile pour t’amener in petto sur ce que tu dois lire, voire même penser, en tombant sur des sites bien enrégimentés ? Fureter, glaner au gré de ton humeur, de ton inspiration, n’est-ce pas plutôt là la voie de l’accomplissement ? Pour ma part, sur le chemin du retour vers la Bretagne avant d’enclencher mon novembre chansonnier – j’aime à m’approprier ce mois cafardant, histoire de l’apprivoiser et d’échapper à son déterminisme déprimant de jours de plus en plus courts -; sur le chemin, dis-je, j’ai repéré un point sur ma route, une étape à même de m’emporter vers de nouvelles rêveries. Saintes ! Ciel, dis-je, il faut que je m’y arrête.

Dont acte, entracte, entre deux tours de route. Et l’ébahissement dans un méandre de Charente. Que du bonheur ! Et pour commencer, une pause gustative au restaurant Les Remparts (que je conseille sans ambages). Comblé à ce stade, aurais-je imaginé trouver dans la foulée un petit écrin d’Histoire de l’époque romaine à l’art roman, au renouveau gothique, en passant par les guerres de religion, la Révolution française et tout le toutim ? Je suis resté baba devant l’Arche de Germanicus, continuum altier avec la Rome antique; la cathédrale… Saint-Pierre (histoire de ne pas être trop dépaysé) – qui porte les stigmates des déchirures religionnesques d’antan, l’église Saint-Eutrope et sa massivité romane ; l’Abbaye-aux-Dames ; les méandres de la Charente ; le rougeoiement de l’automne et, plus que tout…

… plus que tout, la chaleur inattendue d’un café musical ; oui, je te le demande, ô lecteur, comment aurais-je pu l’imaginer ?

Mes pas vont cheminant, de retour de l’Abbaye-aux-Dames, regard attiré par les nombreuses venelles qui croisent perpendiculairement les rues étroites de la rive droite. Que vois-je, non loin de l’Arche de Germanicus, au 4 de la rue de l’Arc de Triomphe ? L’Escarmouche musicale, rien que ça. C’est l’heure du thé.

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Décor enchanteur, piano, guitares, jeux de société à disposition des clients. Deux salles contigües, un jardin, un bar, des tonneaux, et le sourire de ceux qui nous accueillent. Quelques clients sont déjà là. Je ne peux résister à la tentation des six cordes à portée de paluche.

Aurais-je pu concevoir chanter tout de go dans un lieu que je ne soupçonnais pas quelques minutes auparavant, Je suis né Outre-Mer, Sur le chemin des dorissiers, Stella-Maris, le Départ du tambour, répondant ainsi à l’invitation chaleureuse d’une des personnes présentes ? On se retrouve comme un enfant tout content de présenter sa dernière récitation à une réunion de famille. Il est des instants de grande convivialité que l’on savoure goulûment.

Qui c’est qui a dit « Y a rien qui s’passe » ? Clin d’œil à la chanson d’Allain Leprest, bien sûr.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
28 octobre 2015

Liens :
http://www.lesrempartsdesaintes.fr/

https://www.facebook.com/Lescarmouche-Musicale-Caf%C3%A9-Bar-318250058360270/?rf=834794889867099