“La mer est l’avenir de la France”

Mais pourquoi suis-je Français ? A l’heure où la vie médiatico-politique met en exergue le scénario de l’angoisse face à l’étranger, il m’arrive, dans mes pérégrinations, de me sentir en situation de justification à des questions hexagono-franchouillardes ? Pourquoi suis-je Français dans l’espace nord-américain ? Le pourquoi induisant naturellement l’idée non formulée que je pourrais ne plus l’être, sans que le sort de la Terre Patrie en soit modifié.

La lecture de « La mer est l’avenir de la France » de Jean-Marie Biette remet les pendules à l’heure en actualisant le rapport à l’Outre-Mer. Grâce à lui, la France, trop longtemps tournée quasi exclusivement vers la terre, est la deuxième puissance maritime au monde. Du moins, si l’on se réfère à la superficie. Pour l’engagement et les moyens déployés pour une économie redynamisée, revitalisée, il en va tout autrement. Un gargarisme politique sur un plateau télévisé ne fait pas un Colbert.

Je suis Français parce qu’ainsi en a voulu l’Histoire. Mais avec le ferme espoir de voir notre pays s’inscrire dans un volontarisme à l’échelle planétaire. Que de désillusions pourtant dans notre espace géographique que viennent recouper les pages de cet essai ! Mais Jean-Marie Biette brosse un large tableau du rapport à la mer, sans oublier les orientations plus glorieuses. Il n’est pas question ici de diatribe mais d’une analyse rondement menée mettant le lecteur en situation de s’interroger sur les orientations indispensables pour que la France cesse de ronchonner. Il est vrai qu’un pays qui a pour ambition de taxer ses cabanes de jardin souffre d’une vision particulièrement étroite ; comment ne pas avoir le bourdon dans une telle situation ? Une Histoire exaltante ne s’écrit pas avec de piètres carriéristes et le monde politique d’aujourd’hui est affligeant.

Mais Jean-Marie Biette passe aussi en revue ce qui marche, comme dans le secteur de la construction navale ou du nautisme ; des exemples de réussite, d’adaptation réussie dans un contexte de compétition mondialisée où l’on aura su tenir des positions pilotes. De quoi doper les énergies nécessaires. Regarder vers l’horizon est d’abord et avant tout l’acceptation des défis à relever, ce qui le propre du monde de la mer.

Réussites, déceptions, inquiétudes, les sujets abordés sont variés. Pour autant, j’aurais aimé que soit abordée l’extension des droits au-delà des 200 milles marins, les enjeux, la complexité des contextes régionaux. Quoi qu’il en soit, la dernière phrase de l’ouvrage est percutante : « au XXIe siècle, notre pays sera maritime ou ne sera plus grand-chose. » (p.216)

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
12 novembre 2015

Jean-Marie Biette, La mer est l’avenir de la France – L’Archipel – 2015 – ISBN : 978-2-8098-1661-7

PS. A méditer : « on constate que la France consacre six fois plus d’argent à la recherche spatiale qu’à la recherche sur les océans. Et pourtant, le chiffre d’affaires du maritime est dix fois plus important que celui du spatial. » (p.14)