Fred Hidalgo – La mémoire qui chante

« La matinée se lève » chantait Jean Ferrat en compagnie de Christine Sèvres. Je me suis levé en ce matin de décembre 2016, de retour sur mon île. M’attendait, pour la lecture, l’ouvrage de Fred Hidalgo, récemment paru, « La mémoire qui chante ». Fred Hidalgo, « l’échanson » de la chanson, lui, dont je découvre au fil des pages la riche palette de plus de quarante ans de vie de journaliste, lui que j’ai eu la chance de rencontrer un jour à son domicile, auprès de son épouse Mauricette, en compagnie d’Albert Weber, de Marc Robine et d’Hélène.

Fred Hidalgo dont je suivais depuis longtemps sa passion, son engagement pour la chanson, avec Mauricette, abonné que j’étais de longue date à Chorus, le trimestriel de la chanson française, revue qui tira sa révérence un jour de 2009 au grand désespoir de ses créateurs.

Fred Hidalgo tient depuis 2009, année fatidique, un blog sur internet consacré à la chanson. Si ça vous chante…

Mais il ressentait le besoin de fournir à nouveau l’écrit, porté par le papier, dans ce rapport au lecteur que jamais le virtuel ne supplantera. 650 pages de passion… condensée… La mémoire qui chante, donc, alors que la gorge se serre souvent au fil des chapitres quand sont évoqués tant de ciseleurs de chansons aujourd’hui disparus. Savourons la vie qui nous permet, grâce aux enregistrements, d’entendre encore et encore les voix familières. Car un tel livre nous aide à lutter, nous aussi, contre « l’indifférence ou le silence » qui jalonnent le parcours de tant de créateurs, défi encore renouvelé en ces temps voués au pèze esclavagiste, sous couvert du primat du tout économique. Où peut bien résider l’embryon du bonheur quand on s’emmerde devant la télé ou son écran d’ordinateur ? Et si la poésie était la vraie fontaine de jouvence… Accepter que la joie jaillit de l’inattendu, de la diversité des chemins de traverse ; surtout quand survient la chanson, « l’unique héritière d’un acte fusionnel entre la poésie et la musique » (p.82), qui permet de se « rapprocher d’autrui ». (p.104)

84 chapitres pour un parcours musical et poétique de 2009 à 2016, 653 pages d’engagement passionnel, voilà de quoi actionner la tendre mécanique du rêve, surtout si, comme je le fais pour tout ouvrage consacré à la musique, je marque des pauses pour écouter tel ou tel titre, sous la douce impulsion de mon cheminement de lecture.

Il est donc une floraison d’artistes dont les chansons m’enchantent dans mes heures de rêverie ; il en est d’autres que j’aurais dû découvrir et qui déclenchent un sentiment de culpabilité : comment ? J’ai manqué de vigilance ? Qu’importe ! Je prendrai le temps d’emprunter de nouveaux sentiers. Par-dessus tout, j’ai aimé dans ce livre le parcours d’un homme, Fred Hidalgo, l’auteur, dont on mesure les engagements, le regard sur la vie, la chanson devenant ce condensé d’espoir par-delà toutes les adversités. Belle écriture, grande sensibilité , « la liberté dans les yeux », comme chantait Jehan Jonas, dans l’insoumission à la fatalité. Et l’émotion, au fil des pages.

J’ai donc été saisi par les coups de coeur partagés, certains d’entre eux me ramenant à de fabuleuses rencontres ; clins d’oeil également quand le 29 octobre 2011, alors que Fred Hidalgo écrit une chronique, ici rapportée en mémoire à Georges Brassens, jour anniversaire de son rendez-vous avec la Camarde, je chantais à Guéméné sur Scorff ; soudain un gars du pied du bar s’avance et me dit : « T’es pas capable de jouer Brassens, hein ? » Et de lui servir : « Quand les cons sont braves »… Rien de tel pour sceller immédiatement une franche camaraderie.

Que dire encore ? Que j’ai eu l’âme renversée, souvent, au détour de multiples pages…, touchant du doigt « le paradis des musiciens » où tant de tisseurs de rêves se sont allés. « Avec le temps… » Des « coups de pied au coeur » (p.335) à vous transporter l’âme.

Emotion, ai-je dit ? Assurément, comme un fil conducteur et des pages très personnelles d’une intensité suprême. Un livre captivant, écrit « avec la force de l’amour. » (Jordi Barre, ACI catalan).

« C’est une langue belle… », « Ce sont de drôles de types… », « Quand on n’a que l’amour… »

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
12 décembre 2016

Fred Hidalgo, La mémoire qui chante – Journal d’un échanson – Hidalgo Editeur – 2016 – ISBN : 978-2-9558590-0-1

Site internet : http://sicavouschante.over-blog.com

Autre site : http://fred-hidalgo.fr