Bête comme chou ?

A Saint-Pierre, en ce mois de février 2019, tu fais le poireau à 4,20€ le pied, d’où 8,40€ les jumeaux si tu ne veux pas faire le pied de grue. Pourtant tu l’auras fait le poireau, attendant avec avidité le bateau qui allait t’apporter des légumes frais, vu que nous sommes en plein hiver. Mais poireauter n’a pas de prix quand tu sais ce qu’il te faudra débourser pour t’écrier : par ici la bonne soupe ! Ça s’appelle avoir du bol. Faut se casser le chou pour avoir du poireau, comme tu dis. A moi les choux, s’écrie-t-on au pied du mur où il n’est pas question de poireauter pour se renvoyer la balle. Et si tu échoues tu fais chou blanc, ce qui peut remplacer avantageusement le poireau si tu le trouves trop cher. 4,45€ le chou-fleur canadien me dis-tu ? Mon pauvre chou, si au moins tu avais su les planter à la mode de chez nous. Mais non, tu es dans les choux alors que ce que tu préfères c’est le poireau à 4,20€ le pied, tout blanc de tête, et vert de queue. Heureusement qu’il n’y a pas au pays une feuille de chou qui s’attarde sur le prix du poireau, parce qu’il n’y aurait plus qu’à aller cultiver son jardin, je te le dis. En plein hiver ? Ah ça, tu as raison. Ça finirait par ressembler aux douze travaux d’Hercule… Poirot bien entendu. C’est ce que j’ai compris de ce que représente sur nos îles l’observatoire de la vie chère. Peuchère ! Et ne me dis pas après cela que c’est bête comme chou de comprendre le prix du poireau. Il faut mettre cartes sur table, comme aurait pu dire Agatha Christie.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires

13 février 2019

Histoire de vente au détail : un pied de poireau, venu de France chez l’un, vendu 4,20€ est, provenance identique, à 2,62€ chez un autre.