Romain Didier, Souviens-moi

Est-ce dû aux dizaines qui s’enchaînent, sans chapelet ? Temps ouvert de nostalgie en quelque sorte. Ne pas s’en effrayer, telle est la voie, une voix pour se laisser emporter par des notes, par des mélodies, dans Souviens-moi, le dernier CD de l’auteur, compositeur, interprète Romain DidierLa nostalgie en est le quatrième titre. Nostalgie présente encore dans le neuvième titre, On dirait qu’ça passe.

Douze chansons dans ce bel album, de forte tendresse pour un univers intimiste, riche de chair et d’âme, pénétré de chaude musicalité, voix ourlée de tendre vibration. Déroulé de mots de confidences dans La femme qui sommeille ;lien établi d’entrée de jeu avec celui et celle qui le suivent : Merci d’être venu  (Une pensée pour Georges Chelon qui aura eu une démarche identique) ; chanson de souvenir sur un rythme plus cadencé : Je me souviens du bal.

Romain Didier est venu un jour à Saint-Pierre. Était-ce dans les années quatre-vingt ? Je le revois sur la scène du Centre culturel, à gauche, au piano. Le concert nous envoûtait dans l’ample résonance du piano et la tonalité chaleureuse. 

Ici, la mise en forme musicale est subtilement dosée, voix-piano, mais avec aussi l’apport, pour l’un ou l’autre titre, de guitares, basse, violon, batterie, bugle, voix chaque fois bien présente, mixage et mastering parfaitement maîtrisés.

Pas de leçon de conduite, mais une invite à la poésie pour toucher les souffrances comme dans Le prince sans royaume. Interrogations face à la vie dans Une aberration. Regard de grande sensibilité sur la part féminine chez l’homme dans La femme qui sommeille, voix portée par les accords d’une seule guitare. « Ce qui sauv’ra les hommes c’est leur part féminine »… Tic-tac dans le constat de l’essentiel dans Si on ne s’aime plus.

Quand aujourd’hui tout nous pousse à courir, il fait bon s’asseoir, lumière atténuée, choisir l’enveloppe de l’écoute et savourer… Pas besoin d’être à Vérone, à Venise, mais qui sait, se trouver tout prêt d’Avranches ? Ainsi va le charme de la poésie, source dans l’écoute de douce rêverie créatrice. Chanter, pourquoi pas? « Une chanson de Sylvie Vartan »

Et se laisser dorloter au présent par la nostalgie du ravissement…

Henri Lafitte, Chroniques insulaires

3 novembre 2021

Romain Didier, Souviens-moi – CD – EPM 2021 –