Catherine Bardon, Les Déracinés

Une vie de deux jeunes adultes qui commence par un Hymne à l’amour, quoi de plus exaltant ? Mais nous sommes à Vienne, en Autriche, en 1936. La montée du nazisme est fulgurante, les deux jeunes mariés sont nés… Juifs. Et c’est la descente aux enfers…

Le roman de Catherine Bardon, Les Déracinés, est captivant par la justesse de ton, l’art de nous mettre aux côtés des deux personnages clefs du récit. Les voici emportés dans un tourbillon qui nous tient en haleine.

Comment l’obscurantisme et la haine de l’autre trouvent-ils à ce point un terreau fertile ? On ne peut que penser à La ferme des animaux de George Orwell quand l’inimaginable prend corps et se déchaîne en très peu de temps. Homo Sapiens devenu soudain Homo Demens, pour reprendre un terme d’Edgar Morin. La guerre entre la Russie et l’Ukraine s’inscrit dans les mêmes horreurs. Il en est toujours qui mènent la danse macabre.

Il faut fuir, tout perdre sur les chemins de l’exil. Catherine Barton peint ce cheminement avec précision et finesse ; le récit aux multiples rebondissements, est porté, au niveau de la narration, par le jeune mari.

Ils auraient souhaité l’Amérique, l’Amérique des quotas les a refusés. Direction la République dominicaine. La suite est tout autant passionnante, une aventure humaine, sur fond historique réel, à couper le souffle. Alors que la deuxième guerre mondiale bat son plein, on saisit que le monde d’après est en préparation et tout cela est désarmant.

Soubresauts de l’Histoire, dont celle de la République dominicaine du temps du dictateur Trujillo, saga familiale, les déracinés nous font vibrer.

Henri LAFITTE, Chroniques insulaires

19 août 2022

Catherine Bardon, Les déracinés – Pocket – ISBN : 978-2-266-31237-0