Vivre sur Gaïa

Bruno Latour est décédé le 9 octobre 2022. J’ai découvert son travail sur le tard, une écriture, parfois difficile d’accès, de philosophe engagé dans la grande réflexion écologique.

Quoi qu’il en soit, il est un fil apparent, aisé à prendre en compte : nous vivons dans un ensemble fragile, à la dimension d’une couche de quelques kilomètres entre le sous-sol et l’atmosphère de notre planète Terre. Il l’appelle Gaïa. On pourrait aussi dire : la « zone critique », celle de la vie sur terre.

En découle toute une réflexion sur ce qui nous permettra, êtres humains, de répondre aux défis auxquels nous sommes désormais confrontés, dans la fragilité du tout, du fait des interactions et des interconnexions.

Sans oublier nos défis individuels. Savons-nous par exemple faire le point de ses dépendances… ? Et en tirer des leçons d’adaptation.

Etre né et vivre à Saint-Pierre. Donc, admettre que JE est d’abord un NOUS. « Il en est de la ville comme de la termitière : habitat et habitants sont en continuité » sachant que le NOUS dépasse les limites étroites de l’archipel. Il suffit de réfléchir à la provenance de tout ce que nous consommons.

Les repères qui ont prévalu jusqu’aux générations du baby-boom sont désormais bousculés. La croyance au Tout est possible, grâce au progrès et à l’Economie déifiée a subi de sérieux revers, notamment avec la pandémie de Covid-19. La surexploitation tous azimuts des ressources nous plonge aujourd’hui au cœur du dérèglement climatique. 

Les données sont complexes et ne peuvent s’inscrire dans des schémas et des certitudes assénées. S’interroger pour mieux agir est devenu vital. N’avons-nous été endormis par l’apparente facilité du progrès à tout crin, mirage de l’homme augmenté à la clef ? On croyait pouvoir extraire, transformer, sans limites. Les lendemains déchantent. Et « se situer autrement au même endroit » n’est pas chose aisée.

Comble d’ironie, en ces temps de folie planétaire, les ressorts tragiques de l’auto-destruction sont encore malheureusement à l’œuvre. 

Quelle peut être, dans un monde aussi bouleversé, sur Gaïa, notre contribution à un nouveau rapport à la VIE ?

Henri LAFITTE, Chroniques insulaires

10 octobre 2022

Livre cité : Bruno Latour, Où suis-je ? – Edition Les Empêcheurs de Tourner en rond – 2021 – ISBN : 978-2-35925-200-2