Jérémie Bossone, Gloires…

Un festival a ceci de bien qu’il vous permet de plonger soudain dans un univers musical méconnu. Ainsi en aura-t-il été lors du Festival Jambon Beurre organisé à l’automne 2022 à Saint-Pierre et Miquelon. Les premiers accords plaqués sur une guitare électrique par Jérémie Bossone lors de sa première prestation sur nos îles m’auront décontenancé… pour le meilleur. Et les textes…

Trois concerts à Saint-Pierre et pour chaque titre présenté la force d’une découverte. Impossible de rester indifférent à une telle présence scénique, Jérémie Bossone étant accompagné au clavier par son frère Benjamin. Tous deux, en symbiose éclatante, auront connu un grand succès.

Puis est venu le temps d’une écoute… à tête reposée. 

2015… L’album Gloires… enregistré en 2013. Le Cd a traversé l’Atlantique comme une bouteille à la mer.

Première chanson, « Rien à dire ». Ah bon ? Pourtant cette chanson m’aura frappé d’entrée à la salle des fêtes de Saint-Pierre. « On ne viole pas l’inspiration… » Il est vrai. Mais l’on sait que nous avons affaire à une écriture forte. Quelle chanson que « La tombe » la quatrième de l’album ! Ici gît un tel… Mais que fut-il ? Futile qui sait ? Ou pétri d’importance… ou… La chanson brosse une multitude de portraits. Superbe. Les rythmes sont imprégnés de culture musicale rock, revue, faite sienne, subtilement modulée, avec une voix qui traduit tout un univers intérieur. Douceur et aspérités. Pas d’indifférence à la clef.

Douze chansons dont une reprise de Gottingen de Barbara qui retient l’attention dans une vibrante présence vocale.

L’ensemble, bien dosé, est riche également de mise en forme, guitares, basse, batterie. 

« Galway » nous ouvre à d’autres sonorités, plus folks, dans un balancement qui nous convainc tout autant de nous rendre en Irlande. « Quand les canons chanteront / Plus fort que les poèmes… », où aller ? L’enchaînement harmonique et rythmique appelle bien sûr l’harmonica.

Jérémie sait camper les situations, les personnages, ceux en souffrance particulièrement, comme dans « Scarlett ».

Cet album captive par la palette offerte à notre écoute et à l’imaginaire. Les émotions sont au rendez-vous. Qui oserait dire que la vie est une autoroute sans péage, le pied sur l’insouciance ?

Dans l’univers des grandes villes qui touchent le plus grand nombre, que de zones d’ombre que la chanson révèle, que ce soit dans « L’érotique » ou « Les amants de la Seine » ou « L’Empire » ! Ai-je entendu Verlaine, Rimbaud, Baudelaire, Nerval, Lautréamont… ? Faut-il qu’il m’en souvienne ? J’ai découvert au fil de l’écoute une poésie blessée qui pénètre l’âme et qu’une voix envoûte…

… en suivant « Le cargo noir », dernière écriture de l’album, « dans la lumière des créations ».

Henri LAFITTE, Chroniques insulaires

27 novembre 2022

Jérémie Bossone, Gloires – Cd 2016

Site internet : https://www.jeremiebossone.com