Gaëlle Nohant, La femme révélée

Ayant pris connaissance de la sortie d’un nouveau roman de Gaëlle NohantLe Bureau d’éclaircissement des destins, j’ai ressenti le besoin de lire à nouveau La femme révélée, roman paru en 2020, récit fascinant nous mettant en rapport avec la ségrégation raciale aux Etats-Unis, à Chicago en particulier, dans l’après deuxième guerre mondiale, puis la mobilisation contre la guerre au Vietnam à Chicago en 1968. J’ai été tout autant saisi que lors de la première lecture.

Une femme, sa destinée, une histoire de « fractures » et « d’errance » (chapitre 31). Le récit est à la première personne, ce qui nous fait entrer dans l’intimité du personnage qu’on ne quitte plus. L’écriture est fine, profonde et tous les personnages évoqués sont riches d’une humanité complexe, avec ses beautés et ses travers. Nous traversons avec eux une trentaine d’années d’une Histoire américaine qui a des résonances fortes encore aujourd’hui, tout en nous trouvant tour à tour à Chicago et à Paris, dans le Quartier Latin ou dans le XXè arrondissement. Comment ne pas écouter avec émotion We shall overcome de Pete Seeger ? L’espérance nous ressource par-delà tous les tourments et l’adversité. « We shall live in peace some day »…

Du temps des illusions de l’enfance, voire de son premier état de jeune femme mariée à « un homme qui spéculait sur les inégalités » sans qu’elle s’en doutât, au regard sans concessions, appareil photo en bandoulière, quel parcours ! Un souffle puissant nous emporte au fil des pages.

Il est un rappel d’une phrase de Norman Mailer qui parmi d’autres observations nous interpelle : « Il y a une bestialité dans la moelle de ce siècle ». Et aujourd’hui ?

Henri Lafitte, Chroniques insulaires

24 janvier 2023

Gaëlle NohantLa femme révélée – Grasset & Fasquelle 2020 – ISBN : 978-2-246-81932-5