Gare… à la gare !

A la gare mon pote ! Ainsi peut-on résumer l’interview du Préfet de Saint-Pierre et Miquelon, sur les ondes de SPM 1è, en ce début juillet 2015, à propos de… la gare maritime. Car on est d’un pays où l’on oscille perpétuellement entre l’envie d’un grand coup de gueule et celle de laisser libre cours à un rire complètement débridé.

Que je te résume mon enfant, ma sœur, mon frère, toi qui continueras d’en voir de toutes les couleurs même par temps de brouillard, à force d’en avoir plein les mirettes. Des travaux d’agrandissement, d’aménagement de la gare maritime vont bon train sur le quai de la poste – ou de la douane, comme tu veux. Parallèlement on aura appris la mise en route de la construction de deux ferries. Mais c’est là que ça cale, précisément. Car les deux ferries devront bien accoster quelque part, et dormir tranquilles la nuit adossés à la jetée. Mais où ? Accrochés à quelles bittes, là est la question.

Car les ferries, c’est le Conseil territorial. Mais le port, c’est l’État. Dans quel état j’erre ? te demanderas-tu, une fois de plus. Question existentielle du péquin du crû. Qui l’eût cru? Faut être calé, je te le dis, pour débrouiller l’écheveau de ce sac de nœuds. De quoi être à fond de cale à force de mariner.

Autrement dit, quel quai ? Quels travaux ? Quelles études préparatoires ? Quel coût ? Quels délais ? Faudra-t-il une autre gare ? Un petit train pour amener les passagers jusqu’à la gare maritime ? Un service d’autobus ? De taxis ? De VTC ? D’hélicoptères ? De pédalos ?

Sans parler du quai de Miquelon. Qu’il faudra réaménager. L’État encore ? Le coup d’État permanent en quelque sorte. A quel coût ?

Quant à Fortune, qu’en sera-t-il ? Tu t’imagines sortant de ta voiture, monter dans ta guimbarde et enclencher le Drive de ta boîte automatique ? Entrer au Canada comme ça ? Cool, Raoul ? Eh bé ! Ta, ta, ta. Au bout du quai, les ballots !

Autrement dit, aurait-on annoncé l’arrivée de deux ferries sans crier gare ? Et nous tous d’assister, esgourdes rivées au poste, à la gué-guerre larvée de prés carrés à nous faire tourner en rond comme des bourriques.

Dans un premier temps, parce que c’est plus facile, et vas-y des annonces d’interdiction de circuler comme si, comme ça, principe de sécurité, de précaution. Ça ne mange pas de pain. Circulez, y’a rien à voir. Ah bon ? O.K. Interloqué, mon enfant, ma sœur, mon frère…?

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
3 juillet 2015