Jean-Baptiste Malet, L’empire de l’or rouge

Nous vivons dans un monde globalisé, n’est-il pas vrai ? Ou dans une globalisation mondialisée, comme tu préfères. Internet, me diras-tu ; savoir dans l’instantanéité de l’événement que le chat de la voisine de Liu Shao Chi s’est fait écraser à Pékin par un péquin en pousse-pousse… Ou que Melania Trump a serré la main de l’épouse du président Tartempion, lors d’un voyage officiel au côté de son fantasque président de mari, au lieu de faire l’inverse dans l’ordre protocolaire, comme l’aura rappelé un jour (d’un temps médiatique antédiluvien vu que c’était il n’y a pas si longtemps) le Figaro…

Et la purée de tomates que tu achètes là où la vie est toujours moins chère… Tu t’es posé la question de la mondialisation concentrée dans la petite boîte rouge ?

Un livre t’invite à le faire, une enquête aussi captivante qu’un thriller, du journaliste Jean-Baptiste Malet, L’Empire de l’Or rougeenquête mondiale sur la tomate d’industrie.

Les découvertes de réalités insoupçonnées ne manqueront pas, je te l’assure.

Savais-tu par exemple que dans ta petite boîte la purée avait de fortes chances de venir de Chine ? Que dans ta pizza et ton ketchup il pouvait en être de même.

Et alors, ajouteras-tu ? La fatalité, n’est-ce pas ? Comme pour nos équipements électroniques et nos frusques made in…

Que l’histoire de la tomate nous mette au cœur de la mondialisation avec des données à faire dresser les cheveux sur la tête d’une poupée chauve en celluloïd…, voilà à quoi tu peux t’attendre si d’aventure la curiosité te prend de vouloir en savoir plus.

Tu en apprendras sur Heinz, la tomate italienne, l’agromafia, la tomate chinoise, la tomate exportée, son traitement suivant les zones d’export… Eh oui ! L’Afrique hérite souvent de produits sujets à caution. Et sur les salaires de misère de ceux qui bourlinguent et sur les camps de travail chinois (p.145) qui rivalisent avec le goulag dans l’indifférence générale et j’en passe…

Et tout ça pour le fric, sans état d’âme. Tant pis pour ceux qui crèvent. « Le fric, cher ami, ignore la profondeur des cœurs. Il ne connaît que la profondeur des chiffres », comme l’a écrit un auteur congolais, Sony Labou Tansi dans La vie et demie. (Livre de poche, p.77)

Bref, tu ne soulèveras pas ta petite boîte sans te dire : « Purée, les cons servent de conserve à l’industrie mondialisée. »

Et « les cons sont braves », comme dit la chanson.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires

8 juillet 2017

Jean-Baptiste Malet, L’empire de l’or rouge – Fayard – 2017 – ISBN : 978-2-213-68185-6