Un soir de concert à L’Etoile

C’était un samedi soir à Saint-Pierre… Un grand bonheur de me retrouver sur scène à L’Etoile, salle mythique dans notre mémoire collective qui nous ramène au cœur de notre histoire insulaire quand la pêche battait son plein et que le port débordait d’activité. Il y a… cinquante ans je faisais mes premiers pas d’accompagnateur à la guitare au sein du groupe Les Rainbows au Yacht Club ; c’était à la fin de l’été 1969. De ces années reviennent les souvenirs des bals où vibrait l’âme de la population après la journée de labeur.

Avant mes premiers pas en musique, avant même de franchir le seuil de ces lieux de fête, « aller à l’Etoile » s’entendait dans les évocations régulières. En ce 23 février 2019, un soir de grande froidure extérieure, me retrouver dans la chaleur du partage, salle au complet, donnait tout son sens à un cheminement en chansons de quelques décennies.

Stella-Maris, Mathurin fils de calfat, Un pays de marins, Le départ du tambour, et bien sûr La belle de l’Etoile étaient dans l’évidence de ce que j’avais la joie de chanter. Quel plaisir de participer ainsi à cette volonté de redynamiser d’une manière diversifiée la vie nocturne de Saint-Pierre grâce à l’engagement passionné de l’association Cacophonie appuyée par la propriétaire des lieux ! La salle était superbement aménagée ; soudain se retrouvait revivifiée l’atmosphère des boîtes à chansons qui auront marqué le Québec. En ce XXIè siècle qui nous scotche dans le rapport à l’écran plat, les retrouvailles sont plus que jamais nécessaires. Se côtoyer en oubliant les soucis du quotidien, se laisser porter par la musique devient alors source de jouvence. Pour le musicien sur la vague du temps, la joie au visage du public valait toutes les médecines du monde. Et pour porter le plaisir encore plus loin, Marie-Laure Drillet, de passage sur son île natale, avait accroché aux murs plusieurs de ses toiles, débordantes de vie.

« Pourquoi faut-il chanter encore ? » me suis-je un jour demandé. Le public à L’Etoile m’apportait la réponse.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires

24 février 2019