Sophie Chauveau, La fièvre Masaccio

« Personne n’approche plus personne. Ni baisers ni accolades, les amoureux ne s’étreignent plus, les mères ne serrent plus leurs enfants dans leurs bras.(…) Tout le monde est suspect aux yeux de tous… »

Sommes-nous en plein Covid ? Mais non, au tout début du XVe siècle, à Florence et dans les environs. La Peste fait des ravages.

Mais il est un jeune que l’on suit d’entrée, passionné par la peinture, grand artiste déjà. Il a 17 ans, on l’appelle Masaccio, parce qu’il est différent, rêveur, artiste. Puis la Peste s’effiloche, la vie reprend sa marche. L’on entre de plain-pied dans une effervescence créatrice. « Dans ce mouchoir de poche, tous rivalisent de talents ». Le jeune autodidacte rencontre deux artistes bien établis, Donatello, le sculpteur et Brunelleschi, l’architecte. La magie est instantanée.

Le roman nous plonge dans un bain vivifiant. Nous sommes dans les « balbutiements de ce qu’on n’appelle pas encore « Renaissance » ». Que c’est exaltant ! L’appel de la beauté ! Quoi de plus vivifiant pour l’être humain, pour une communauté ! Florence était… d’exception.

Masaccio, le premier peintre à avoir apposé son nom à une œuvre ! Internet permet aujourd’hui d’aller facilement à la rencontre de ses réalisations. On mesure alors l’influence qu’il aura pu exercer, même si son nom n’est pas celui que l’on mentionne à brûle-pourpoint. Et pourtant… Précurseur de l’auto-portrait, de la perspective dans la représentation des personnages…

Le roman nous ouvre, dans la célérité et la précision de l’écriture, des voies insoupçonnées propres à déployer l’imaginaire. A 24 ans, le jeune artiste est devenu une référence… Il est des flamboyances qui coupent le souffle. Mozart, Jaco Pastorius, Jimi Hendrix, Rimbaud…, mes rêveries s’envolent.

« C’est tout de suite un géant, dans tous les sens du mot, devant qui se découvre ses pairs. » Se prend toute la mesure de la passion au fil d’un récit perlé, le suspense en filigrane. L’on est comblé.

Une aventure humaine a pris corps, toute une période renaît, Florence flamboie de déploiement artistique, on se laisse entraîner. Et l’on ouvre des portes qui vous ravissent, tout en restant… pantois et enthousiaste.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires

30 décembre 2022

Sophie Chauveau, La fièvre Masaccio – Editions Télémaque – 2022 – ISBN : 978-2-7533-0461-1