Chronique du 12 septembre 2006 (2)

Que l’on flagorne les ministres, quoi de plus naturel après tout ? Cela ne fait-il pas partie des jeux de cour fléchés ? Quoi de nouveau toutefois depuis les temps royaux de la viole de gambe ? Le ministre délégué au tourisme a posé ses arpions sur nos îles en ce 11 septembre 2006, – que l’Etat soit remercié pour son Falcon -, il aura rencontré les pontes de nos couvées, chacun agitant l’encensoir – mon Dieu ! -, mais après ?

Il nous faut un « tourisme choisi », de déclarer notre Maire. Mais n’est-ce pas le touriste qui choisit et pas l’inverse ? Car l’on a beau brosser notre enseigne à la française pour qu’elle reluise, les mêmes discours revenant comme l’aïoli d’un plat moult fois réchauffé, la confiance s’étiole. Peut-on raisonnablement concevoir un réel développement au prix que ça coûte de venir se plonger dans la brume des activités à découvrir dans le labyrinthe du possible ? Quelles sont les infrastructures dignes de ce nom qui nous permettent d’échapper aux aléas du froid, de la bruine et de la purée de pois ? Que valent nos illusions d’aujourd’hui au regard des jours (et des nuits) où nos voisins de Terre-Neuve venaient faire la fête, du temps où l’initiative d’un seul homme – celle de Francis Leroux – valait tout un Syndicat d’initiatives ? Avons-nous pris à bras le corps le prix de nos consos ? Des taxes sur l’alcool ? De la bouftance ? Du billet d’avion ? Du billet bateau ? Festoyer sur « George Street » à Saint-Jean de Terre-Neuve n’est-il pas plus attractif qu’au centre-ville de Saint-Pierre ?

Force est de constater tout en s’en gendarmant, que le front de mer continue de « s’administrativer », que des restaurants ferment ou sont sur le point de mettre la clef sous la porte, que les hôtels ont de moins en moins pignon sur rue.

Car lorsqu’il faut gagner sa croûte dans le domaine, faut bien aller au-delà des illusions qui ont une fâcheuse tendance à se perdre.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
12 septembre 2006