18 juin 1999 : menu tourisme à l’émission d’information générale Rencontres de RFO. Sur le plateau, quatre personnes imposées de choix :
en amuse-gueule, la journaliste ;
en plat de consistance, le directeur de l’Agence Régionale du Tourisme ;
en poire pour la soif, une tenancière d’hôtel ;
en douceur, le patron d’Air Saint-Pierre, la compagnie la plus (au choix… : sympa à sa façon de t’aider à serrer ta ceinture – chère à nos cœurs – fiable sans visibilité – française dans l’adversité – circonspecte par-dessus le marché – surveillée par le Ministère du Budget…) au monde.
Alors, cher lecteur singulier, t’ai-je mis l’eau à la bouche ? T’ai-je sollicité les glandes salivaires ? Ce plat sied-il à ta voracité ? La carte te paraît-elle suffisamment sialagogue ?
Je te sens soudain goguenard. Crois-tu qu’à Saint-Pierre l’hôtellerie étoilée en soit encore à l’ère du goguenot ?
Sache, ô lecteur subreptice, qu’à Saint-Pierre, le chef-lieu, y’a une piste qui est toute chaude,
Vu qu’le goudron il est récent
Eh oui madame
Tarmacadam
Pour les oiseaux
Couleur argent
Et puis bientôt le Président
Le seul, l’unique, le nôtre, le grand,
Viendra poser son p’tit coucou
Salut les gars, c’est moi, coucou
(pauvre rime riche)
Je suis venu vous dire deux mots
Ne m’parlez plus du Kosovo
Et puis au fait ce con de Bill
Ce grand dadais, ce gland nubile,
A oublié qu’en Amérique
J’étais chez moi comme en Afrique.
On n’a pas dit ça, me dit la journaleuse.
Mais alors, interrogé-je, que dites-vous que nous n’entendîmes ?
Eh bien l’patron d’Air Saint-Pierre a dit qu’il voulait bien voler davantage, mais que c’était risqué.
Et l’hôtelière ?
Que si tu n’allais pas sur l’île-sœur, tu étais un faux frère et qu’il fallait tâter de la peau de morue.
Et le Directeur de l’Agence du Tourisme ?
Qu’en donnant plus en en prenant moins, c’était la meilleure façon de gagner plus en perdant moins.
J’ai rien perdu alors ? conclus-je.
Le tourisme suscite de ces inquiétudes chez les gens de mer.
Henri Lafitte, Chroniques insulaires
19 juin 1999