Décentralisation et quadrature du cercle

Dix-huit ans après avoir eu droit à la reconnaissance de sa spécificité, l’Archipel a un nouveau rendez-vous avec l’Histoire dans le cadre du projet de loi de décentralisation. Car, paradoxalement, malgré le nouveau statut de Collectivité territoriale obtenu en 1985, l’Archipel est resté dépendant d’un pouvoir fortement centralisé.

Le vote du budget primitif 2003 du Conseil Général en aura permis une nouvelle illustration avec l’intervention in petto de l’Etat dans le financement à 100% de quatre opérations dont la construction d’une maison pour les personnes âgées à Miquelon. On l’aurait su avant, on aurait pu prévoir nos investissements autrement, a expliqué le président du Conseil Général sur les ondes de RFO le 31 mars 2003. Mais pouvait-il en être autrement ?

Force est de constater que ces dernières années ont vu une accélération des charges de fonctionnement par les Collectivités et la marge de manœuvre, en matière d’investissements, est réduite. Les grandes orientations politiques dépendent donc du bon vouloir du pouvoir parisien. Il n’est que de mesurer l’ampleur des attentes à chaque visite ministérielle pour se rendre compte que les dés sont quelque part pipés.

Or la décentralisation a pour vocation de renforcer encore les charges des collectivités. Qu’en sera-t-il demain de la définition des orientations politiques de l’Archipel, si tant est qu’il puisse y en avoir ? Il est en tout cas illusoire que l’Archipel puisse développer une activité suffisamment diversifiée pour retrouver les équilibres de la pêche florissante.

Et la survie passe inexorablement depuis des décennies par une dépendance étroite envers un système jacobin. Les repères traditionnels risquent avec la décentralisation d’être remis en question et le désarroi des politiques archipelliens peut s’en trouver accentué.

Henri Lafitte, 3 avril 2003