Chronique du 20 octobre 2004

« I am going to Miquelon. »

Phrase qui, tu l’admettras, a son relent d’anglais dans le cadre du transport inter-îles.

« Have a good day. »

« Good day sun shine / I need to laugh », chantaient les Beatles. Il fait beau en ce 19 octobre ; je suis sur l’escargot des mers – l’Arethusa – deux heures pour me rendre à Miquelon ; le Maria Galanta est sur le slip. A Saint-Pierre, crois-tu ? Mais non, crois-moi. A Saint-Jean, qu’il lui a fallu se rendre. Notre slip est en liquette, déclassé le pauvret. Encore une part de notre patrimoine à fond de cale ; une situation renversante pour une cale de halage, tu avoueras. Et tout ça dans l’indifférence la plus totale. Encore du boulot en moins à Saint-Pierre et du job en plus à Terre-Neuve ! Ce qui n’empêchera pas un administratif sûr de sa décision de se caler les joues…

Au moins, sans cale de halage on ne pourra pas nous monter un bateau, commentera un sociologue. « Quoi que nos fils feront de leur carrière / Des ingénieurs ? des avocats ? / Autant brûler la pigouillère /Faut plus d’calfats, faut plus d’calfats ! » ruminera un rêveur nostalgique.

Viendra peut-être le jour où l’on se penchera sur la question d’une reclassement. Alors là, moussaillon, t’auras le temps de voir ta barbe pousser et la quille arriver dans le sillage de tes souvenirs d’antan.

Peut-être chanteras-tu alors : « I’m a poor lonesome sailor / A long long way from home… »

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
19 octobre 2004