Chronique du 28 novembre 2006

Et si l’aventure du patrimoine maritime n’était pas réservée qu’aux autres ?

Il aura suffi d’un flash, celui qu’aura eu Yannick Lafourcade à son retour à Saint-Pierre après une vingtaine d’années d’absence, pour qu’en 2003, en acquérant le Radar III, porteur délaissé d’une grande part de notre histoire d’assistance aux navires et d’accueil aux équipages, les bases d’un défi prometteur puissent être aujourd’hui sur la jetée.

Il aura été rejoint par des bénévoles passionnés au sein de l’association locale « Sauvons notre patrimoine maritime » afin de sauver une structure confirmée dans son originalité et son intérêt par Gérard d’Aboville en personne, président de la Fondation du Patrimoine maritime et fluvial, lors de son récent séjour sur nos îles. Et si ce bateau, construit en Acadie en 1965, au chantier Boudreau à Mavillette, dans la région des grands commencements, devenait, par ses traits originaux, le 145è bâtiment sauvé des eaux de l’inconscience, inscrit à sa juste place au Patrimoine national ?

L’urgence n’est-elle pas désormais de donner un peu de temps au temps pour que les travaux de réfection s’organisent ? Certes, la coque est désormais sur un quai. Mais l’enjeu est de taille : porter demain nos couleurs dans un projet permettant des liens multiples avec notre environnement géographique et historique, avec Terre-Neuve, la Nouvelle-Ecosse, l’Acadie, le Québec… Je te signale par exemple, ô lecteur, que le lien entre les Madelinots, s’intitule… Le Radar. Il est des clins d’œil encourageants. L’association archipellienne ne manque pas d’idées réalistes, à condition qu’on lui permette d’assurer la première étape : la laisser respirer pour refaire membrures et varangues abîmées, retaper le joyau en s’entourant de conseils avisés, dans une aventure à taille humaine débarrassée des impatiences mortifères.

Car peut-on trouver demain un meilleur ambassadeur de notre identité qu’un porte-drapeau maritime ? Le drame ne serait-il pas que par inconscience on se gausse du moindre effort qui tendrait à carguer à nouveau les voiles de notre fierté ?

Fort heureusement, les politiques, tous bords confondus, ont été sensibles à la démarche ; que des acteurs locaux soient aussi motivés mérite qu’on s’y attarde.

Il y aurait là de quoi animer la flamme de nos convergences. Cela fait du bien de rencontrer des timoniers du courage pour une identité en mouvement.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
27 novembre 2006