Chronique du 2 octobre 2009

« Sur l’écran noir de mes nuits blanches… » Je m’en suis allé à la brune affriolante d’un vendredi terminus, fin d’un parcours de jours ouvrés en ouverture d’insouciance, à l’orée d’un week-end bienvenu. La brume m’imprègne de sa torpeur ouatée ; j’ai l’embarras du choix car il nous est loisible de profiter, comme à Paris, d’une Nuit blanche culturelle proposée par le Centre culturel ; théâtre, lectures, cinéma, musée, découverte de la ville en nocturne… Programme riche d’imagination qui témoigne d’une vitalité rassurante.

Et moi qui ne suis pas un noctambule… Les ans auront-ils eu raison de mes ardeurs d’antan ? « Sur l’écran noir de mes nuits blanches / Moi je me fais du cinéma… » Faut bien divaguer quand on vogue ainsi vers les rives du plaisir.

C’est qu’à la patinoire, l’association ADIACAL a une fois de plus déployé son énergie pour un marché hors les murs de l’habitude. Je m’en vais donc flâner au vent discret d’un octobre mouillassant. Il est vingt et une heure trente… « Sur l’écran noir de mes nuits blanches / Moi je me fais du cinéma / Sans pognon et sans caméra… » Zut alors ! J’ai beau me nougaroïser, c’est que les commerçants ne seront pas contents si d’aventure ils découvrent les paroles que je me murmure. Mais non, je glanerai de-ci, de-là et qui sait ? Peut-être que… De toute manière, je franchirai plus tard le seuil du bar de chez Moha. Il est des fils tissés qui résistent aux intempéries. D’ailleurs il ne bruinait plus… « Bardot peut partir en vacances / Ma vedette… » Des contes « zéro-tiques » sont annoncés à la bibliothèque municipale… Mazette ! S’agirait-il de contes libertins ? Je savoure ces bouffées de liberté qui nous font sortir de la gangue catholicisée de nos ardeurs étouffées d’antan… À moins qu’il ne s’agisse de contes sans tick dans la bouilloire de l’imaginaire…

Faire des affaires à la grande braderie organisée par les commerçants ; voguer au fil de ce qui sonne sans trébucher… Programme alternatif en continu. Sauf que pour le commerce, il y aura interruption avant la reprise du samedi. Des bateaux de croisière sont annoncés pour la fin de semaine. Quelque chose semble nous dépasser et nous ne nous en doutions guère. Serions-nous sous l’effet du cachet de l’effervescence ?

Il aura bien fallu que je me rentre pour me tourner mon cinéma, pour m’endormir dans la nuit blanche qui se sera débrouillée sans moi. Je suis là sur la page blanche, le clavier chaud au bout des doigts, avec le souvenir chaleureux de l’amitié au pied du bar.

À l’aube, place à l’esprit du Tai-chi. Il fera beau, ça c’est promis.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
2 octobre 2009