Chronique du 28 janvier 2017

Ah ! mon île ! mes îles ! points d’ancrage qui se serrent, pour se réchauffer contre les frimas des hivers incontournables ! Saint-Pierre, Miquelon, Île aux Marins ! Je suis né au milieu de vous et je m’en irai un jour vers les rives de l’insondable. 

Mais je souffre de toutes les turpitudes, de tous les déchirements, des luttes fratricides, de cet appât de l’accessoire qui nous fait oublier si facilement notre fragilité humaine et notre épopée collective. Je souffre de toutes les arrogances, de toutes les condescendances… Je savoure les sourires et les regards enluminés, je résonne de toutes les sensibilités dépourvues de faux-semblants.

J’avais les yeux tournés vers des maisons de soleil dans l’immobilité de l’absence. Après-midi de janvier quand le ciel s’éclaircit soudain dans un bleu clair de froidure. Dialogue muet entre nature et histoire humaine.. Toi le phare, un jour tu fus construit ; toi la digue, ne me renvoies-tu pas aux allers et retours incessants des camions Euclide jaunes de ma jeunesse ? Et vous maisons de carte postale, que nous racontez-vous de vos heurts, malheurs, bonheurs, déchirures et sursauts solidaires contre l’adversité ? Et toi la neige qui embellis les rochers à fleur d’océan, à quoi rêves-tu ?

J’étais là, dérisoire, appareil photo à la main et je songeais à ce qui nous identifie aujourd’hui.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires

28 janvier 2017