Carnet de lecture : Jeanne Benameur, Laver les ombres

Peut-on « Laver les ombres » ? « Il y a des choses qu’on a faites / Et dont on garde le secret »… Les paroles extraites de Créer de Georges Chelon trouvent le chemin des réminiscences, en écho au titre du roman de Jeanne Benameur paru en… 2008. Eh oui ! On peut à loisir s’extraire des rentrées littéraires qui ne sont pas les passages obligés du plaisir. Entrer dans une librairie indépendante, se laisser guider par l’inspiration. Rentré chez soi, être disponible pour l’inattendu.

Une libraire à Vichy m’avait sensibilisé à Jeanne Benameur. Il m’aura fallu un peu de temps. Dans ce roman, on vit avec les personnages, deux en particulier, la mère, âgée désormais ; la fille, quarantenaire, chorégraphe. Solitudes des douleurs, de l’inexprimé puis soudain la convergence du dialogue. Jusqu’à quel point peut-on partager l’intime, surtout s’il renferme des pages douloureuses ? Jeanne Benameur nous fait pénétrer avec une grande sensibilité de l’écriture dans la chambre noire où soudain se révèle le difficile. Parler, « laver les ombres » de la souffrance intérieure. Oscillation entre le mouvement et l’immobilité. On ne quitte plus ce roman édité chez Babel et qui tient aisément dans la paume de la main pour nous interpeller. C’est beau, nuancé, poignant.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires

18 octobre 2019

Jeanne Benameur, Laver les ombres, Babel, 978-2-7427-9300-6