Chronique du 4 avril 1999

« Ouvrez les yeux ! », titre le maire éditorialiste Marc Plantegenest dans le numéro 753 de l’Echo des Caps du 6 avril.
« Contrôle annuel gratuit pendant les Semaines Lumière et Vision », précisent dans une publicité de prévention routière, la Gendarmerie et la Direction de l’Equipement, en 4è de couverture. « Qu’attendez-vous pour faire vérifier vos phares ? L’accident. »

Le ton péremptoire de toutes ces affirmations me trouble. Serions-nous à ce point aveugles ou mal éclairés ? Ou sommes-nous tout simplement victimes d’un excès de poudre aux yeux ?

Aveuglement du citoyen, défaut d’éclairage de sa voiture, il est urgent de faire les comptes :

  gratuité de traitement pour nos chères bagnoles, dit la publicité.

  4000 balles par foyer fiscal pour combler le déficit de 7 800 000 francs de la Municipalité de Saint-Pierre, dit le Maire.

Je n’en crois pas mes yeux. Je veux toute la lumière. « Pour conduire en sécurité, faites vérifier votre acuité visuelle », titrent les responsables de la Prévention leur article explicatif. Il est urgent d’en faire autant pour ses impôts, si j’ai bien compris le Maire. « Pour 85% (des automobilistes) leur vision pourrait être améliorée ». En irait-il de même pour les votants que nous sommes ?
Moi qui croyais pouvoir dormir les yeux fermés, me voilà aux aguets. Ai-je toutes les données sous mes pupilles de citoyen aveuglé ? C’est la faute aux absences de recettes, si je regarde le tableau présenté par le Maire, cruel manque à gagner lié à l’aveuglement du Conseil général, obstiné à en mettre plein les mirettes à leurs éternels rivaux. Mais qu’en est-il des dépenses ? Il est difficile d’y voir clair pour l’aveuglé ordinaire que je suis.

Toutes les facettes de cette fichue politique viennent de perturber soudain mon analyse catadioptrique simpliste. C’est promis. Je tâcherai d’y voir plus clair.

Un éclair me traverse alors l’opacité cérébrale :

  Pour lever le voile d’un tel obscurantisme, il nous faut un voyeur, me suggère le lobe gauche.

  T’as pas froid aux yeux, me dit le lobe droit. Ils vont t’avoir à l’œil.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
4 avril 1999