Chronique du 26 novembre 2003

« Vous avez répondu maintenant pendant plus d’une heure… »
On l’aura compris les « cinquante-deux minutes pour convaincre » sur les ondes de RFO n’auront pas suffi puisqu’il aura fallu jouer les prolongations. Mais tu me diras qu’une partie de foot peut durer plus longtemps que prévu. Alors pourquoi pas une émission politique ? Bref – parce que je veux faire court – celle du 25 novembre aura été dans la droite ligne de celles qui l’ont précédé, plus longue que prévu, informative toutefois, non contradictoire, propre à faire sourire dans ses moments d’embrouillamini dans les questions parfois posées, quelquefois accompagnées de commentaires à haute valeur désopilante, désaltérante (parce qu’il ne faut pas croire qu’on aura regardé tout ça chaque fois sans boire un coup), diurétique (pour ceux qui auront eu envie de pisser), rassurante pour ceux qui cherchaient à être rassurés, décevante pour ceux qui s’attendaient à être déçus, statu quotaire (pourquoi pas un néologisme) pour les trottoirs, les trous dans les rues, les émanations de fumée incinérative (tiens, je t’en place un autre), réflexive au détour de quelques données concrètes dont la charge afférente au fonctionnement ordinaire, sentimentale au détour de l’une ou l’autre évocation, mesurée dans le dit et le… non-dit, perplexatoire (je t’en invente un autre – à toi d’en deviner le sens), creusatoire (un petit dernier) pour le petit creux que tout un chacun n’aura pas manqué de ressentir à cause d’un repas pris sur le pouce. Et j’évite d’être long, c’est te dire.

« Vous avez été responsable d’un des cimetières les plus connus du monde » a-t-on entendu de la bouche du journaliste. Ah ! Hein ? Les Américains vont se retourner dans leurs tombes en Normandie. Et Paul Valéry qui s’était décarcassé avec son cimetière marin, « ce toit tranquille, où marchent des colombes ». Et le Père-Lachaise ? Et le « cimetière des pauvres » de Georges Brassens ? Et le cimetière d’Arlington ? Et les tombes des pharaons ? Et le cimetière des amours mortes ? Et celui des illusions succombées ? Et celui des bonnes intentions ? Et le cimetière ouïgour de Kashgar, aux portes du Pakistant et de l’Afghanistan ?

Sur le conseil général, le Maire aura été muette comme une tombe. Elle était là en tant que maire, pas pour parler des paires, des pairs et des impairs. Requiem in pace, bonnes gens.

Bref, tu vois que je veux encore résumer, on aura aussi compris qu’il est aussi difficile de traiter les huiles de vidange que les huiles sur pied. Sauf que celles sur pied peuvent gripper les rouages, pendant que les premières ont permis de l’éviter.

L’émission était suivie d’une pièce de théâtre « J’y suis, j’y reste ». Clin d’œil du hasard, me diras-tu ? Mais quand on fait de la politique, ce n’est pas pour partir tout de même. Non ?

Bref (bon, si tu es encore en train de me lire, c’est que tu es capable de regarder plus d’une heure une émission de 52 minutes), c’était par une nuit sans lune dans un grand hall d’aérogare, les rêves s’envolaient vers des horizons vermeils où sommeillait une âme en quête d’un paradis inaccessible.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
26 novembre 2003