La presse française – et subséquemment l’opinion versatile -, tremble dans ses culottes parce que le nuage radioactif venu du Japon arrive sur l’Hexagone. Pendant ce temps, là-bas, au pays du soleil levant, place au crépuscule. La catastrophe s’amplifie, dans une spirale infernale, rejets radio-actifs, évacuations, pollution de toute la chaîne alimentaire… La capitale est touchée dans un contexte de très forte concentration humaine.
« Mais la conscience des périls est encore bien faible et dispersée. Mais la conscience de la nécessité de dépasser l’histoire n’a pas encore émergé. Mais la conscience d’une communauté de destin reste déficiente. Mais la conscience d’une Terre-Patrie est encore marginale et dispersée », de souligner Edgar Morin dans son dernier ouvrage, La Voie.
Or la réaction, sur nos îles, à Saint-Pierre et Miquelon, comme en en France hexagonale, n’était-elle pas de s’assurer qu’il n’y ait pas de risques… individuels ? Gare au nuage ! Terre et ciel chantez sans fin un air trois fois sain ! Amen. Réaction humaine compréhensible certes, dans un espoir accroché à la prise nécessaire éventuelle de capsules d’iode, le trouillomètre en vrille sur l’échelle à jetons. On joue à se faire peur, dans l’enfermement de la virtualité qui envahit notre quotidien, en y croyant sans trop y croire.
Mais quand, au Japon, l’eau courante est déconseillée aux bébés – sans offrir toutefois de solution de remplacement -, difficile de les imaginer, adultes, chanter guillerets « Dans l’eau de la claire fontaine ».
Certes, être d’ici, d’ailleurs, et de la planète, le tout en même temps, nécessite, à l’ère de l’anthropocène – je te renvoie à un bouquin que je te conseille en P.S. (post-scriptum) – une autre interrogation que le repli frileux à l’intérieur de frontières illusoires.
Henri Lafitte, Chroniques insulaires
23 mars 2011
P.S. Claude Lorius – Laurent Carpentier, Voyage dans l’anthropocène, Éditions Actes Sud – ISBN 978-2-7427-9534-5
Autre ouvrage : Edgar Morin, La Voie, Fayard, ISBN 978-2-213-65560-4