Pérégrinations et… commémoration

Mes pas m’auront porté vers la ville meurtrie du Havre, un jour de commémoration, le 8 mai 2016. La fanfare joue « Aux morts » devant l’Hôtel de Ville ; les drapeaux se sont inclinés ; il fait beau. La grande place devant les autorités et les combattants est en contrebas. Les dégâts ont été considérables ; on reconstruit sur les gravats et les morts. Dans quelques minutes, je visiterai un appartement témoin d’Auguste Perret, l’architecte de la reconstruction. Je pense à la folie humaine ; j’aimerais tant me bercer de l’illusion de la paix ; mais je ne peux laisser de côté l’Irak et la Syrie, les ventes d’armes des puissants, la clarté et l’obscur, la beauté de la vie et l’inavouable. Ici, au Havre, on n’a pas encore pris le temps d’identifier toutes les victimes des bombardements. Comment s’appelaient-ils, tous ceux qui gisent sous nos pas de badauds ? Depuis mon départ pour ma tournée printanière, je vis des heures intenses. Mais ce moment de recueillement, pensées tournées vers ceux des nôtres qui connurent l’enfer de Normandie et autres lieux de batailles, m’aura retourné comme un oiseau désemparé. Demain je chanterai pourtant.

P1000230.jpg J’ai ressenti le grand clocher lancé vers le ciel de l’église en béton Saint-Joseph comme un immense pied de nez à notre folie d’êtres si démesurément contradictoires. Il faisait si beau en ce jour de mémoire.

Henri Lafitte, Chroniques insulaires
9 mai 2016